Mis à jour le 16/12/2023
C’est trop tard pour le climat, plus cher que les réacteurs de 3ème génération, moins décarboné que les renouvelables par € investi, dépendant de l’étranger pour l’approvisionnement en l’uranium1, produisant plus de déchets et comportant autant si pas plus de dangers !
La production de déchets radioactifs (plus dangereux) est proportionnellement plus grande et on craint des fuites de neutrons à travers les parois plus minces2 .
Certains prétendent que les SMR3 demandent moins d’eau de refroidissement, ce qui reste à prouver; il faut cependant préciser qu’il existe différents types de SMR en développement, les modèles Américains Nuscale et Français Nuward sont à eau pressurisée, comme la plupart des réacteurs commerciaux actuels, ainsi que ceux des sous-marins nucléaires. Le futur prototype Belge du CEN à Mol sera à neutrons rapides, et refroidi avec un alliage de plomb, un système de refroidissement qui d’après eux pourrait résister à une panne de courant – mais brièvement alors, car le plomb risque de se figer, si la réaction s’arrête et que le courant de chauffage n’est pas rétabli ! Le CEN prétend qu’il ne nécessite pas (ou moins) d’eau, utiliserait de l’uranium non-enrichi, et pourrait recycler des déchets nucléaires. On demande à voir le prototype, au plus tôt en 2035. Et comme les parois de protection sont plus minces que dans les réacteurs classiques, ces neutrons rapides pourraient fuir encore plus que les neutrons lents émis à travers les parois des SMR à eau pressurisée4. Notons que les gros réacteurs à neutrons rapides n’ont pas eu le succès escompté, il en reste trois connectés au réseau électrique en 2020 sur la planète (sur +- 400 !), les autres ont été arrêtés, comme Superphénix… Nous ne pensons pas qu’un réacteur à neutrons rapides soit plus sûr et produise des déchets plus propres, en particulier parce qu’il produit et utilise du plutonium.
Perte des économies d’échelle : l faudrait construire des SMR en très très grand nombre pour (peut-être) en diminuer (un peu) les coûts, et ce n’est pas envisagé à ce jour. Les projets SMR actuels coûteront proportionnellement (beaucoup) plus cher que les grosses installations nucléaires actuelles (3ème génération).
Nous ne voyons donc pas bien l’intérêt de remplacer une centrale nucléaire par une grappe de 3 à 10 SMR sur le même site; l’autre option est de disséminer des SMR dans le territoire pour remplacer les anciens réacteurs qui sont de l’ordre de 10 fois plus puissants.
Cela pourrait sembler rationnel de les installer près des zones industrielles énergivores, par exemple les aciéries, comme source d’électricité et de chaleur5.
Mais la multiplication et la dispersion des SMR, même en quantité limitée, générera plus de transports de matières dangereuses à proximité de la population dans notre pays densément peuplé, plus d’enquêtes publiques avant l’implantation, plus de zones à protéger contre les intrusions, le terrorisme et la prolifération éventuelle…
L’utilisation possible de SMR sur des bases militaires ou leur présence dans des zones en conflit posera des problèmes de sécurité, comme en Ukraine actuellement (Zaporijja), et en Arménie ou en 2020, lorsque l’Azerbaïdjan à envoyé un missile en direction du réacteur nucléaire Arménien de Metsamor, qui a heureusement pu être intercepté en vol.
On pourrait croire que, vu les quantités de matières radioactives plus petites, les accidents éventuels seraient moins graves… Mais ils seraient, malgré tout, susceptibles de polluer une zone très étendue : un tiers ou un dixième de Fukushima, ou de Tchernobyl dans un pays densément peuplé comme la Belgique, ce serait quand-même une catastrophe qui ruinerait complètement le pays6 et qui en rendrait une grande partie totalement inhabitable pour une durée extrêmement longue. Le retour des habitants après quelques années n’est qu’un mythe qui se ferait au mépris de la santé de ces cobayes crédules.
La probabilité d’accident(s) augmentera proportionnellement au nombre de SMR en activité; en fait il y a là une inconnue, mais nous devrions respecter le principe de précaution, un accident peut toujours se produire.
On ne parle pas pour le moment de SMR au Thorium, moins susceptibles d’accident grave, mais qui posent d’autre problèmes notamment celui de la prolifération, et qui ne sont pas encore au point. Pour rappel, les réacteurs au Thorium ont été étudiés depuis les années 1960… sans succès. Tous les projets industriels ont été abandonnés depuis des années.
Les spécialistes de Stanford ont récemment démontré que les SMR génèrent proportionnellement plus de déchets encore plus dangereux…
Ces SMR ne sont en aucun cas une solution au problème insoluble de la gestion des déchets, ni de l’extraction de l’uranium très polluante et énergivore, y compris en énergies fossiles… souvent dans des pays très éloignés et pas toujours fiables (Kazakhstan, Russie, Mongolie, etc.).
Le modèle belge de réacteur à neutrons rapide, tel que décrit dans les articles ci-dessous, prétend exploiter le stock d’uranium pendant des milliers d’années alors que le stock actuel d’uranium sera épuisé dans un siècle avec les réacteurs existants. Cela semble supposer que le SMR du CEN fonctionne comme un surgénérateur, qui produirait son propre combustible sous la forme de plutonium, un élément très toxique et dangereux, il en restera une quantité non-négligeable dans les déchets qui seront quand-même produits. Contrairement aux désinformations sur le plutonium 239, celui-ci , grâce à son descendant principal l’Uranium 235, ne génère pas de la radioactivité pendant 24 000 ans, mais pendant plusieurs milliards d’années7….
Étant donné les différences de coût et le caractère peu décarboné du nucléaire un € investi dans le nucléaire économise beaucoup moins de CO₂ que le même € investi dans les énergies renouvelables ou les économies d’énergie.
Concernant les recherches sur la faisabilité d’un SMR en Belgique, l’investissement serait de 100 millions pour les études du CEN, En 2021 De Croo parlait 2021 d’un milliard d’euros pour le projet SMR d’ici 2030, la ministre Tinne Van Der Straeten dit dans l’article ci-dessous qu’un petit réacteur serait construit à Mol vers 2035, un prototype de démonstration très tardif !
Nous apprenons ces jours-ci que le premier ministre actuellement en exercice envisage de repousser Tihange 3 et Doel 4 jusqu’en 2045 et prolonger éventuellement aussi Tihange 1 au delà de 2025, peut-être parce qu’il se rend compte que les fameux SMR belges ne seront pas prêts à temps…
Les articles ci-dessous montrent l’échec économique du projet américain Nuscale, et les balbutiements du projet français Nuward. Pour se justifier, les pro-nucléaires français disent qu’un prototype est toujours cher, et qu’ils vont disperser ensuite jusqu’à 200 SMR de par la France… Peut-être pour palier l’échec probable de l’EPR ?
Panorama mondial des SMR dans le World Nuclear Status Report dans l’édition 2022 page 26 on peut lire que les SMR arriveront avec beaucoup de retard, souvent plus cher que les réacteurs de 3ème génération !
La version anglaise 2023 du World Nuclear Report est sortie le 6 décembre 2023, au chapitre des SMR, à la page 316, on apprend que malgré 86 projets de recherche, “les seuls SMR déployés au cours des deux dernières années sont les deux réacteurs à haute température refroidis au gaz en Chine. [Effectivement, le 06/12/2023 : un SMR refroidi au gaz vient d’être mis en service en Chine ! ] Les deux réacteurs [flottants] KLT-40S en Russie sont entrés en service en 2020 … Les petits réacteurs modulaires, du fait qu’ils sont conçus pour produire moins d’électricité que les réacteurs de conception standard, seront nécessairement confrontés à des défis économiques plus importants. Par rapport aux grands réacteurs, les SMR seront plus coûteux par unité de capacité installée et produiront une énergie plus coûteuse. La tendance des concepteurs de SMR à s’orienter vers des puissances de conception plus importantes – la Corée du Sud passant d’une conception de 100 MW à une conception de 170 MW, Rolls-Royce proposant une conception de 470 MW – prouve l’importance continue des économies d’échelle. Cependant, même en augmentant la puissance de sortie, les SMR ne sont toujours pas rentables. Le cas de NuScale, dont le coût est estimé à environ 20 000 dollars par kW de capacité installée, illustre le coût des SMR. Tous les modèles de SMR sont développés avec d’importantes sommes d’argent public. La question reste de savoir pourquoi les gouvernements continuent d’investir dans une série de technologies qui semblent vouées à l’échec commercial.”
C’est trop cher, trop tard, trop peu décarboné, cela ne va pas dans le sens de l’indépendance énergétique1, et cela retardera encore la transition énergétique en détournant des montant qui seraient bien mieux investis dans le renouvelable, la rénovation du bâti, les économies d’énergies.
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Les derniers articles de presse
Le “Canard Enchaîné” du 15/11/2023 montre l’échec économique du projet américain Nuscale, et les balbutiements du projet français Nuward. Aux USA le secteur privé jette l’éponge, en France, le contribuable continuera à payer les prototypes d’Emmanuel Macron, “quoi qu’il en coûte”…
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Le “petit” nucléaire n’est pas à l’abri des déboires du “gros”, comme l’EPR français
Source « Le Monde » 10/11/2023
La société américaine NuScale Power, spécialisée dans le développement de petits réacteurs nucléaires modulaires, a annoncé, jeudi 9 novembre, l’abandon du projet d’installation de sa première centrale électrique de taille industrielle, faute de clients. »
PDF de l’article disponible ici
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Tinne Van der Straeten rappelle à l’ordre le Centre d’étude de l’énergie nucléaire
Source « 7 sur 7 » 22/11/2023
La ministre fédérale de l’Énergie, Tinne Van der Straeten (Groen), a rappelé à l’ordre, par courrier et à la Chambre, le Centre d’étude de l’énergie nucléaire SCK CEN à Mol. Ce dernier et la ministre l’ont confirmé mercredi.
La raison de cette critique [de Tinne Van der Straeten] est un accord de coopération récemment conclu. Au début du mois, la Belgique a rejoint un consortium international pour développer les SMR – les petits réacteurs nucléaires modulaires. Une déclaration d’intention a ensuite été signée en présence du Premier ministre Alexander De Croo et du président roumain Klaus Iohannis. Normalement, un petit réacteur sera construit à Mol d’ici 2035-2040. [De Croo parlait en 2021 d’un milliard d’euros pour le projet SMR d’ici 2030]
C’est à propos de la conclusion de cet accord que la ministre exprime aujourd’hui plusieurs inquiétudes. Le gouvernement fédéral a décidé l’année dernière d’investir 100 millions d’euros dans la recherche sur les petites centrales nucléaires du futur. Celles-ci seraient plus sûres, produiraient moins de déchets et émettraient moins de CO₂
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Voici la centrale nucléaire du futur qui pourrait alimenter (beaucoup mieux) la Belgique en électricité
Source ; RTL 24/11/2023
Comment produira-t-on de l’électricité à l’avenir ? Après avoir annoncé la fermeture puis la prolongation de certaines centrales atomiques, le gouvernement fédéral investit dans la recherche sur les petits réacteurs modulaires. Une technologie nucléaire présentée comme celle du futur. A Mol, le centre d’étude nucléaire développe un modèle de démonstration avec quatre partenaires internationaux. Une expérience unique au monde qui permet de mieux utiliser les ressources en uranium et même de recycler d’anciens déchets nucléaires.
Détails du projet sur le site du CEN
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Références
(1) Il n’y a pas d’uranium en Belgique, nous dépendons du contexte géopolitique !
Dans le passé, en tout cas en 2022, une partie non-négligeable (jusqu’à 40 %) de l’uranium enrichi utilisé dans les réacteurs belges venait de Russie, ou passait par des sociétés contrôlées par la Russie, par exemple au Kazakhstan.
(2) Une étude de Stanford montre qu’il y aura proportionnellement plus de déchets et plus irradiants que dans les réacteurs classiques
Cette étude est surtout basée sur les PWR, mais la plupart des conclusions peuvent s’appliquer au nouveau projet de SMR belge.
(3) Définitions sur Wikipedia (il y a plusieurs types de SMR!)
EN https://en.wikipedia.org/wiki/Small_modular_reactor
FR https://fr.wikipedia.org/wiki/Petits_r%C3%A9acteurs_modulaires
(4) Dans les gros réacteurs à neutrons rapides, fonctionnant en “surgénérateur”, on capture les neutrons avec des parois d’uranium 238, qui fournira du plutonium qui servira de combustible… Cela suppose des parois lourdes et massives (l’uranium a une densité de 19 Kg/Litre !) , parlons-nous toujours de “petits modèles” ?
(5) Les assurances pour le nucléaire existent, mais sont complètement insuffisantes
(6) Mais pour produire de l’hydrogène, il y a d’autres techniques plus décarbonées et plus propres que l’électricité nucléaire, et pas nécessairement au moyen de l’électrolyse de l’eau.
(7) Après 10 demi-vies de 24 000 ans, soit 240 000 ans, alors qu’il ne reste qu’à peu près un millième de la quantité initiale de plutonium 239, la presque totalité de ce plutonium s’est transformée en uranium 235, qui a une demi-vie de plusieurs centaines de millions d’années, pendant laquelle tous les descendants de l’U235 seront produits en continu, le schéma de désintégration complet du plutonium 239 montre que ses descendants radioactifs seront présents pour largement plus d’un milliard d’années !
Un missile tiré vers un réacteur nucléaire : c’est fait, en 2020 !
Les coûts du nucléaire comparés à ceux des énergies renouvelables
List of small modular reactor designs
Small Nuclear Power Reactors – World Nuclear Association (October 2023)(2)
Les SMR sont des objets dangereux et inutiles pour lutter contre le réchauffement climatique, par Stéphane Lhomme
Point de vue de Michèle Rivasi
Bill Gates investit dans les SMR
Le futur énergétique de la Belgique dépendra-t-il des mini-réacteurs nucléaires?
Le nucléaire, une énergie décarbonée capable de diminuer les émissions de CO₂ au niveau mondial ?
Les réacteurs nucléaires au thorium, une fausse bonne idée
Wise International : Thorium nuclear reactors
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Merci Philippe pour ton article!