Le manque de flexibilité du nucléaire belge

En 2020, les éoliennes de la mer du Nord ont été arrêtées parce que le nucléaire belge n’était pas pilotable, donc que sa puissance ne pouvait pas être diminuée pour donner la priorité à l’énergie renouvelable.

Nos amis français nous répliquent que certains de leurs réacteurs sont tout à fait flexibles et peuvent adapter leur puissance à la demande.

Cet article répond donc à cette question !

Il y a deux méthodes de régulation de la réaction de fission par l’absorption de neutrons : grâce aux barres de contrôle1, qu’on monte ou qu’on descend, ou par la régulation de la concentration en bore dans l’eau du circuit primaire.

Sur certains réacteurs français, les barres de contrôle permettent de faire du « suivi de charge2 », en adaptant la puissance en continu. Chez nous, ces barres, qui sont nécessaires pour les arrêts complets et d’urgence des réacteurs, sont conçues différemment et ne permettent pas de faire ce suivi de charge.

Pour la modulation, il ne nous reste en Belgique que la modification de la concentration en bore, qui est beaucoup moins souple et génère de sérieuses restrictions expliquées par l’AFCN. En particulier pour diminuer la concentration en bore, il faut traiter et diluer de grandes masses d’eau.

Dans un document de l’AFCN, à la page 26, M. Frank Hardeman déclare :

« La raison technique exacte de l’existence d’une limitation de la modulation des réacteurs nucléaires si l’on n’utilise que le contrôle de la concentration en bore.

En cas de modulation de puissance, la puissance peut uniquement être réduite ou augmentée en adaptant la concentration en bore dans l’eau primaire. En cas de faibles concentrations, il faut introduire beaucoup d’eau dans le circuit primaire ou en évacuer beaucoup. [Il faut donc également diluer pour diminuer la concentration]. Cela entraîne de nombreux flux d’eau usée supplémentaires, ce qui présente des limitations opérationnelles.

À un moment donné, le traitement ne peut plus se faire correctement : c’est pourquoi la modulation n’est pas autorisée en cas de faibles concentrations en bore dans l’eau primaire. »

Les grey control rods (barres grises) sont des barres de contrôle1 utilisées dans les réacteurs où la puissance est contrôlée en continu : on appelle cela le “suivi de charge ». Ce n’est pas prévu en Belgique où ces barres de contrôles ne sont pas présentes.

Les limitations, assez restrictives, de durée et de fréquence des modulations  sont expliquées dans l’annexe 2 du document de l’AFCN, à la page 43 :

  • Modulation étendue :
  • Possible sur Doel 4 et Tihange 3
  • La réduction maximale de la puissance est de 50 % de la puissance nominale
  • La puissance (une fois réduite) doit rester constante pendant la modulation (pas de suivi de charge)
  • Maximum de 30 modulations par cycle [de combustible]
  • La durée maximale d’une modulation est de 72 heures
  • Le temps minimum entre 2 modulations est de 72 heures
  • La concentration en bore de l’eau primaire doit être supérieure à 200 ppm3.

Notes :
(1) Les barres de contrôle sont des barres métalliques chargées en certains éléments qui absorbent les neutrons, ce qui permet de réguler la réaction de fission. Les barres grises ont un coefficient d’absorption des neutrons adapté au suivi de charge. Les barres « belges » absorbent plus de neutrons, et servent à l’arrêt rapide, pour la maintenance ou dans les cas d’urgence.

(2) « Load following » se traduit par « suivi de charge », une pratique utilisée chez EDF sur certains réacteurs.

(3) Donc pas possible en fin de cycle du combustible, soit durant de nombreux mois avant la fin du cycle complet de 4,5 ans.

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Les petits réacteurs nucléaires modulaires (SMR)

Mis à jour le 16/12/2023

C’est trop tard pour le climat, plus cher que les réacteurs de 3ème génération, moins décarboné que les renouvelables par € investi, dépendant de l’étranger pour l’approvisionnement en l’uranium1, produisant plus de déchets et comportant autant si pas plus de dangers !
La production de déchets radioactifs (plus dangereux) est proportionnellement plus grande et on craint des fuites de neutrons à travers les parois plus minces2 .

Certains prétendent que les SMR3 demandent moins d’eau de refroidissement, ce qui reste à prouver; il faut cependant préciser qu’il existe différents types de SMR en développement, les modèles Américains Nuscale et Français Nuward sont à eau pressurisée, comme la plupart des réacteurs commerciaux actuels, ainsi que ceux des sous-marins nucléaires. Le futur prototype Belge du CEN à Mol sera à neutrons rapides, et refroidi avec un alliage de plomb, un système de refroidissement qui d’après eux pourrait résister à une panne de courant – mais brièvement alors, car le plomb risque de se figer, si la réaction s’arrête et que le courant de chauffage n’est pas rétabli ! Le CEN prétend qu’il ne nécessite pas (ou moins) d’eau, utiliserait de l’uranium non-enrichi, et pourrait recycler des déchets nucléaires. On demande à voir le prototype, au plus tôt en 2035. Et comme les parois de protection sont plus minces que dans les réacteurs classiques, ces neutrons rapides pourraient fuir encore plus que les neutrons lents émis à travers les parois des SMR à eau pressurisée4. Notons que les gros réacteurs à neutrons rapides n’ont pas eu le succès escompté, il en reste trois connectés au réseau électrique en 2020 sur la planète (sur +- 400 !), les autres ont été arrêtés, comme Superphénix… Nous ne pensons pas qu’un réacteur à neutrons rapides soit plus sûr et produise des déchets plus propres, en particulier parce qu’il produit et utilise du plutonium.

Perte des économies d’échelle : l faudrait construire des SMR en très très grand nombre pour (peut-être) en diminuer (un peu) les coûts, et ce n’est pas envisagé à ce jour. Les projets SMR actuels coûteront proportionnellement (beaucoup) plus cher que les grosses installations nucléaires actuelles (3ème génération).
Nous ne voyons donc pas bien l’intérêt de remplacer une centrale nucléaire par une grappe de 3 à 10 SMR sur le même site; l’autre option est de disséminer des SMR dans le territoire pour remplacer les anciens réacteurs qui sont de l’ordre de 10 fois plus puissants.
Cela pourrait sembler rationnel de les installer près des zones industrielles énergivores, par exemple les aciéries, comme source d’électricité et de chaleur5.
Mais la multiplication et la dispersion des SMR, même en quantité limitée, générera plus de transports de matières dangereuses à proximité de la population dans notre pays densément peuplé, plus d’enquêtes publiques avant l’implantation, plus de zones à protéger contre les intrusions, le terrorisme et la prolifération éventuelle…

L’utilisation possible de SMR sur des bases militaires ou leur présence dans des zones en conflit posera des problèmes de sécurité, comme en Ukraine actuellement (Zaporijja), et en Arménie ou en 2020, lorsque l’Azerbaïdjan à envoyé un missile en direction du réacteur nucléaire Arménien de Metsamor, qui a heureusement pu être intercepté en vol.

On pourrait croire que, vu les quantités de matières radioactives plus petites, les accidents éventuels seraient moins graves
… Mais ils seraient, malgré tout, susceptibles de polluer une zone très étendue : un tiers ou un dixième de Fukushima, ou de Tchernobyl dans un pays densément peuplé comme la Belgique, ce serait quand-même une catastrophe qui ruinerait complètement le pays6 et qui en rendrait une grande partie totalement inhabitable pour une durée extrêmement longue. Le retour des habitants après quelques années n’est qu’un mythe qui se ferait au mépris de la santé de ces cobayes crédules.
La probabilité d’accident(s) augmentera proportionnellement au nombre de SMR en activité; en fait il y a là une inconnue, mais nous devrions respecter le principe de précaution, un accident peut toujours se produire.
On ne parle pas pour le moment de SMR au Thorium, moins susceptibles d’accident grave, mais qui posent d’autre problèmes notamment celui de la prolifération, et qui ne sont pas encore au point. Pour rappel, les réacteurs au Thorium ont été étudiés depuis les années 1960… sans succès. Tous les projets industriels ont été abandonnés depuis des années.

Les spécialistes de Stanford ont récemment démontré que les SMR génèrent proportionnellement plus de déchets encore plus dangereux…
Ces SMR ne sont en aucun cas une solution au problème insoluble de la gestion des déchets
, ni de l’extraction de l’uranium très polluante et énergivore, y compris en énergies fossiles… souvent dans des pays très éloignés et pas toujours fiables (Kazakhstan, Russie, Mongolie, etc.).
Le modèle belge de réacteur à neutrons rapide, tel que décrit dans les articles ci-dessous, prétend exploiter le stock d’uranium pendant des milliers d’années alors que le stock actuel d’uranium sera épuisé dans un siècle avec les réacteurs existants. Cela semble supposer que le SMR du CEN fonctionne comme un surgénérateur, qui produirait son propre combustible sous la forme de plutonium, un élément très toxique et dangereux, il en restera une quantité non-négligeable dans les déchets qui seront quand-même produits. Contrairement aux désinformations sur le plutonium 239, celui-ci , grâce à son descendant principal l’Uranium 235, ne génère pas de la radioactivité pendant 24 000 ans, mais pendant plusieurs milliards d’années7….

Étant donné les différences de coût et le caractère peu décarboné du nucléaire un € investi dans le nucléaire économise beaucoup moins de CO₂ que le même € investi dans les énergies renouvelables ou les économies d’énergie.
Concernant les recherches sur la faisabilité d’un SMR en Belgique, l’investissement serait de 100 millions pour les études du CEN, En 2021 De Croo parlait 2021 d’un milliard d’euros pour le projet SMR d’ici 2030, la ministre Tinne Van Der Straeten dit dans l’article ci-dessous qu’un petit réacteur serait construit à Mol vers 2035, un prototype de démonstration très tardif !
Nous apprenons ces jours-ci que le premier ministre actuellement en exercice envisage de repousser Tihange 3 et Doel 4 jusqu’en 2045 et prolonger éventuellement aussi Tihange 1 au delà de 2025, peut-être parce qu’il se rend compte que les fameux SMR belges ne seront pas prêts à temps…

Les articles ci-dessous montrent l’échec économique du projet américain Nuscale, et les balbutiements du projet français Nuward. Pour se justifier, les pro-nucléaires français disent qu’un prototype est toujours cher, et qu’ils vont disperser ensuite jusqu’à 200 SMR de par la France… Peut-être pour palier l’échec probable de l’EPR ?

Panorama mondial des SMR dans le World Nuclear Status Report dans l’édition 2022 page 26 on peut lire que les SMR arriveront avec beaucoup de retard, souvent plus cher que les réacteurs de 3ème génération !
La version anglaise 2023 du World Nuclear Report est sortie le 6 décembre 2023, au chapitre des SMR, à la page 316, on apprend que malgré 86 projets de recherche, « les seuls SMR déployés au cours des deux dernières années sont les deux réacteurs à haute température refroidis au gaz en Chine. [Effectivement, le 06/12/2023 : un SMR refroidi au gaz vient d’être mis en service en Chine ! ] Les deux réacteurs [flottants] KLT-40S en Russie sont entrés en service en 2020 … Les petits réacteurs modulaires, du fait qu’ils sont conçus pour produire moins d’électricité que les réacteurs de conception standard, seront nécessairement confrontés à des défis économiques plus importants. Par rapport aux grands réacteurs, les SMR seront plus coûteux par unité de capacité installée et produiront une énergie plus coûteuse. La tendance des concepteurs de SMR à s’orienter vers des puissances de conception plus importantes – la Corée du Sud passant d’une conception de 100 MW à une conception de 170 MW, Rolls-Royce proposant une conception de 470 MW – prouve l’importance continue des économies d’échelle. Cependant, même en augmentant la puissance de sortie, les SMR ne sont toujours pas rentables. Le cas de NuScale, dont le coût est estimé à environ 20 000 dollars par kW de capacité installée, illustre le coût des SMR. Tous les modèles de SMR sont développés avec d’importantes sommes d’argent public. La question reste de savoir pourquoi les gouvernements continuent d’investir dans une série de technologies qui semblent vouées à l’échec commercial. »

C’est trop cher, trop tard, trop peu décarboné, cela ne va pas dans le sens de l’indépendance énergétique1, et cela retardera encore la transition énergétique en détournant des montant qui seraient bien mieux investis dans le renouvelable, la rénovation du bâti, les économies d’énergies.


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Les derniers articles de presse

Le « Canard Enchaîné » du 15/11/2023 montre l’échec économique du projet américain Nuscale, et les balbutiements du projet français Nuward. Aux USA le secteur privé jette l’éponge, en France, le contribuable continuera à payer les prototypes d’Emmanuel Macron, « quoi qu’il en coûte »…

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Le “petit” nucléaire n’est pas à l’abri des déboires du “gros”, comme l’EPR français

Source « Le Monde » 10/11/2023
La société américaine NuScale Power, spécialisée dans le développement de petits réacteurs nucléaires modulaires, a annoncé, jeudi 9 novembre, l’abandon du projet d’installation de sa première centrale électrique de taille industrielle, faute de clients. »
PDF de l’article disponible ici

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Tinne Van der Straeten rappelle à l’ordre le Centre d’étude de l’énergie nucléaire

Source « 7 sur 7 » 22/11/2023 
La ministre fédérale de l’Énergie, Tinne Van der Straeten (Groen), a rappelé à l’ordre, par courrier et à la Chambre, le Centre d’étude de l’énergie nucléaire SCK CEN à Mol. Ce dernier et la ministre l’ont confirmé mercredi.
La raison de cette critique [de Tinne Van der Straeten] est un accord de coopération récemment conclu. Au début du mois, la Belgique a rejoint un consortium international pour développer les SMR – les petits réacteurs nucléaires modulaires. Une déclaration d’intention a ensuite été signée en présence du Premier ministre Alexander De Croo et du président roumain Klaus Iohannis. Normalement, un petit réacteur sera construit à Mol d’ici 2035-2040. [De Croo parlait en 2021 d’un milliard d’euros pour le projet SMR d’ici 2030]
C’est à propos de la conclusion de cet accord que la ministre exprime aujourd’hui plusieurs inquiétudes. Le gouvernement fédéral a décidé l’année dernière d’investir 100 millions d’euros dans la recherche sur les petites centrales nucléaires du futur. Celles-ci seraient plus sûres, produiraient moins de déchets et émettraient moins de CO₂

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Voici la centrale nucléaire du futur qui pourrait alimenter (beaucoup mieux) la Belgique en électricité
Source ; RTL 24/11/2023
Comment produira-t-on de l’électricité à l’avenir ? Après avoir annoncé la fermeture puis la prolongation de certaines centrales atomiques, le gouvernement fédéral investit dans la recherche sur les petits réacteurs modulaires. Une technologie nucléaire présentée comme celle du futur. A Mol, le centre d’étude nucléaire développe un modèle de démonstration avec quatre partenaires internationaux. Une expérience unique au monde qui permet de mieux utiliser les ressources en uranium et même de recycler d’anciens déchets nucléaires.
Détails du projet sur le site du CEN


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Références

(1) Il n’y a pas d’uranium en Belgique, nous dépendons du contexte géopolitique !
Dans le passé, en tout cas en 2022, une partie non-négligeable (jusqu’à 40 %) de l’uranium enrichi utilisé dans les réacteurs belges venait de Russie, ou passait par des sociétés contrôlées par la Russie, par exemple au Kazakhstan.

(2) Une étude de Stanford montre qu’il y aura proportionnellement plus de déchets et plus irradiants que dans les réacteurs classiques
Cette étude est surtout basée sur les PWR, mais la plupart des conclusions peuvent s’appliquer au nouveau projet de SMR belge.

(3) Définitions sur Wikipedia (il y a plusieurs types de SMR!)
EN https://en.wikipedia.org/wiki/Small_modular_reactor
FR https://fr.wikipedia.org/wiki/Petits_r%C3%A9acteurs_modulaires

(4) Dans les gros réacteurs à neutrons rapides, fonctionnant en « surgénérateur », on capture les neutrons avec des parois d’uranium 238, qui fournira du plutonium qui servira de combustible… Cela suppose des parois lourdes et massives (l’uranium a une densité de 19 Kg/Litre !) , parlons-nous toujours de « petits modèles » ?

(5) Les assurances pour le nucléaire existent, mais sont complètement insuffisantes

(6) Mais pour produire de l’hydrogène, il y a d’autres techniques plus décarbonées et plus propres que l’électricité nucléaire, et pas nécessairement au moyen de l’électrolyse de l’eau.

(7) Après 10 demi-vies de 24 000 ans, soit 240 000 ans, alors qu’il ne reste qu’à peu près un millième de la quantité initiale de plutonium 239, la presque totalité de ce plutonium s’est transformée en uranium 235, qui a une demi-vie de plusieurs centaines de millions d’années, pendant laquelle tous les descendants de l’U235 seront produits en continu, le schéma de désintégration complet du plutonium 239 montre que ses descendants radioactifs seront présents pour largement plus d’un milliard d’années !

Un missile tiré vers un réacteur nucléaire : c’est fait, en 2020 !

Les coûts du nucléaire comparés à ceux des énergies renouvelables

List of small modular reactor designs

Small Nuclear Power Reactors – World Nuclear Association (October 2023)(2)

Les SMR sont des objets dangereux et inutiles pour lutter contre le réchauffement climatique, par Stéphane Lhomme

Point de vue de Michèle Rivasi

Bill Gates investit dans les SMR

Le futur énergétique de la Belgique dépendra-t-il des mini-réacteurs nucléaires?

Le nucléaire, une énergie décarbonée capable de diminuer les émissions de CO₂ au niveau mondial ?

Les réacteurs nucléaires au thorium, une fausse bonne idée

Wise International : Thorium nuclear reactors

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Le tritium, un élément radioactif méconnu

Le tritium (3H) est un isotope radioactif de l’hydrogène, c’est-à-dire qu’il comporte un proton, comme l’hydrogène, et a deux neutrons en plus1. Cet atome d’hydrogène radioactif s’insère donc dans l’eau et donc aussi au cœur des organismes vivants, jusque dans les cellules et dans les molécules de l’ADN. La contamination par le tritium se fait donc par la voie gazeuse (H2), liquide (eau tritiée appelée HTO) et par le tritium organiquement lié (TOL).

Normes concernant l’eau tritiée (HTO) 2

PaysValeurs seuil (Bq/L)dans l’eau potable
Canada7 000
UE100Valeur indicative3
Finlande30 000
Australie76 103
Russie7 700
Suisse10 000
USA740
Californie740Recommandé : 15 Bq/L
Manitoba7 000
Ontario20Valeur recommandée – ODWAC (Canada) 
UK100
Japon60 000Autorisation de déversement dans la mer : 1500 Bq/L
OMS10 000
Sources4


La variabilité de ces « normes » montre bien que ces valeurs ne découlent pas d’une recherche scientifique axée sur la sécurité sanitaire des travailleurs et des citoyens, mais résultent de simples décisions administratives avalisées par des autorités politiques conseillées par des experts dont le nom est parfois gardé secret, ce qui est souvent le cas à l’Euratom…

Pour l’OMS, le seuil est de 10 000 Bq/L pour l’eau tritiée. Ceci a été calculé en considérant qu’une personne buvant chaque jour une eau contenant 10 000 becquerels de tritium par litre ne devrait pas recevoir une dose de rayonnement supérieure à 100 μSv/an, soit le dixième de l’apport maximal recommandé dû à la radioactivité artificielle (1 mSv/an).
Le seuil de 100 Bq/L Européen n’est pas une valeur limite, mais une valeur indicative à partir de laquelle il faut investiguer et vérifier s’il n’y a pas d’autres sources radioactives, elle est officiellement inférieure à un risque sanitaire.

Au Japon, le maximum actuel est de 60 000 Bq/L dans l’eau potable, mais, une fois dilué, de 1500 Bq pour le déversement dans la mer du fameux stock d’eau tritiée dont la contamination doit être inférieure ou égale à ce maximum pour « respecter les normes »…

Critique de la détermination du seuil « sanitaire » de 10 000 Bq/L par l’OMS

La CRIIRAD a trouvé diverses erreurs techniques dans le calcul menant à ce résultat qui, toutes, tendent à minimiser les risques5, mais le pire est que la valeur guide choisie (10 000 Bq/L d’eau de boisson par an) consiste à accepter un risque de cancer bien plus élevé que ce qu’on « tolère » pour les polluants chimiques cancérogènes. Explication : le seuil « tolérable  » proposé par l’OMS pour un produit chimique suspect est de 1 cancer en excès sur 100 000 personnes exposées, soit 1 cancer induit par le polluant chimique pour 100 000 personnes consommant, tout au long de leur vie, une eau dont le niveau de contamination atteindrait la valeur guide pour ce produit.

En appliquant la valeur guide de 10 000 Bq/L de tritium sur l’eau de boisson de toute une vie, on obtient au moins 160 cancers en excès / 100 000 personnes, et un facteur de risque plusieurs centaines de fois supérieur à celui relatif aux valeurs guides des polluants chimiques cancérogènes…

La CRIIRAD conclut que la valeur guide déclenchant une investigation pour le tritium ne devrait pas dépasser 10 Bq/L !

Le TOL (Tritium Organiquement Lié)

La faible activité et dangerosité apparente du tritium doit être réévaluée par le fait que le tritium s’insère jusqu’à l’intérieur de la cellule, et peut ainsi tirer « à bout portant » ! Lorsque le Tritium remplace un atome d’hydrogène dans une molécule organique d’un organisme vivant, il peut rester plus longtemps dans n’importe quelle cellule ou n’importe quel organe, de 20 à 50 fois plus que l’eau tritiée. Le TOL est donc globalement plus radiotoxique que l’eau tritiée, car certains atomes de tritium se fixent longtemps à des endroits où ils sont nuisibles. Le Tritium se lie préférentiellement au carbone (C), mais il peut aussi s’insérer dans les molécules contenant de l’oxygène (O), du phosphore (P), de l’azote (N), du soufre (S) sous forme de TOL. N’oublions pas que l’hydrogène compte pour plus de 60% des atomes du corps humain et à peu près 10% en masse.

Alors que l’eau tritiée peut être évacuée complètement du corps humain après quelques dizaines de jours, le TOL peut rester plus d’un an dans les tissus biologiques, et se diffuser donc dans les chaînes trophiques, en plus de la voie de l’eau tritiée.

La croyance simpliste en l’innocuité de la dilution dans l’environnement est maintenant indéfendable, vu que le tritium peut se stocker dans les organismes vivants6. Normalement, il ne devrait pas y avoir d’accumulation, mais il y a des exemples non généralisables où la concentration en tritium est bien plus grande dans certains organismes marins que dans l’eau où ils vivent ! Cela se produit surtout quand la contamination s’étend sur une longue période, la proportion de TOL augmente dans l’organisme jusqu’à un équilibre entre absorption et élimination, et dans beaucoup de ces cas, il y a alors plus de tritium dans l’organisme que dans l’eau environnante. L’ASN reconnaît l’existence de ces cas, ne se prononce pas sur les explications ni sur la bioaccumulation, et propose d’améliorer les méthodes de détection et la recherche biologique7.

L’eau tritiée s’élimine assez rapidement des organismes vivants. Mais pour le TOL, une fois les organismes morts, les échanges d’eau et de matières s’arrêtent ou diminuent, et ce tritium lié peut donc rester piégé et s’accumuler longtemps (des années) dans les organismes morts et les sédiments8, qui sont une source de tritium pour les générations suivantes !

L’augmentation des leucémies infantiles autour des centrales nucléaires est-elle liée à une contamination radioactive ?

Dans l’article du Dr Ian Fairlie sur le sujet, que nous avons présenté et traduit en français, nous pouvons voir qu’il y a, selon plusieurs études, une augmentation des cas de leucémie infantiles dans les 5 km autour des centrales nucléaires étudiées. Corrélation n’est pas causalité : les statistiques utilisées nous disent simplement qu’on peut être sûr à 90 % que ces augmentations ne sont pas dues au hasard, mais sont liées à la présence des ces personnes près d’une installation électronucléaire. Évidemment si, comme le font certains gouvernements, on choisit un test à 95 %, cela devient « non significatif ». Mais ces augmentations sont bien réelles en Grande-Bretagne, en Suisse, en Allemagne, en France, et posent donc question, voir le tableau dans cet article : l’augmentation est de 37 % sur l’ensemble des cas étudiés dans les 4 pays. Même si les chiffres sont petits, ils sont tous en augmentation dans cette étude. Dans le proche voisinage du centre de recherche de Mol-Dessel en Belgique (< 5 km), Sciensano observe une incidence 3 fois plus élevée de leucémie infantile aiguë qu’en Belgique et les résultats sont statistiquement significatifs. Mais cette étude ne trouve pas d’incidence significative dans les 20 km autour de Doel et de Tihange. La contamination par un élément radioactif est à étudier. La connaissance exacte des doses reçues (uniques ou chroniques) par les populations autour des centrales nucléaires de ces études n’est pas suffisamment précise pour pouvoir affirmer que le tritium, ou un autre élément radioactif est lié à ces augmentations. Les expositions directes par irradiation, hors accident, sont à exclure de l’investigation. Cependant, il est clair que les normes sous-estiment très fortement, voire ne prennent pas en compte les effets de la contamination interne des polluants radioactifs, en particulier par le tritium, surtout « in utero ».

Dans un article ultérieur en 2014, Ian Fairlie précise :

« Début 2009, le débat a été en partie relancé par la célèbre étude KiKK (Kaatsch et al, 2008) commandée par le gouvernement allemand, qui a révélé une augmentation de 60 % du nombre total de cancers et de 120 % du nombre de leucémies chez les enfants de moins de 5 ans vivant dans un rayon de 5 km autour de toutes les centrales nucléaires allemandes. À la suite de ces résultats surprenants, les gouvernements français, suisse et britannique se sont empressés de mener des études à proximité de leurs propres centrales nucléaires. Toutes ont constaté une augmentation des cas de leucémie, mais comme les chiffres étaient faibles, ces augmentations n’étaient pas “statistiquement significatives”. En d’autres termes, on ne pouvait pas être sûr à 95 % que les résultats n’étaient pas le fruit du hasard. »

Mais on peut en être sûr avec 90 % de chances de ne pas se tromper qu’il y a un lien entre ces augmentations et le fait d’habiter dans la zone de 5 km autour de ces centrales nucléaires. Cette simple constatation interpelle, même si la cause exacte de ces augmentations ne peut actuellement être déterminée avec certitude.
De plus, une étude épidémiologique récente montre que les travailleurs du nucléaire ont plus de risque de mourir d’une leucémie.

« Le rejet en mer d’eau radioactive contaminée provenant du site nucléaire de Fukushima est-il acceptable ? Est-il sûr ? »

Dans cet article, le Dr Tim Mousseau, de l’Université de Caroline du Sud, a fait en 2023, une revue de la littérature scientifique concernant les conséquences biologiques de l’exposition au tritium. Il a trouvé ,parmi 70 000 références, seulement 250 concernant les aspects biologiques de cet élément souvent négligé .
« La première conclusion de cette étude est qu’il y a étonnamment peu d’informations sur un sujet qui préoccupe tant de monde. Il n’existe aucune étude publiée sur les effets du tritium sur les cancers humains, et très peu sur les effets du tritium dans les systèmes naturels. La grande majorité des études sur les effets du tritium ont été menées sur des organismes de laboratoire, ce qui rend l’extrapolation aux conditions naturelles délicate. Notre deuxième conclusion est que, contrairement à certaines idées reçues selon lesquelles le tritium est une source de rayonnement relativement bénigne, la grande majorité des études publiées indiquent que les expositions, en particulier celles liées aux expositions internes, peuvent avoir des conséquences biologiques importantes, notamment des dommages à l’ADN, une altération de la physiologie et du développement, une réduction de la fertilité et de la longévité, et peuvent entraîner des risques élevés de maladies, y compris le cancer. Notre principal message est que le tritium est une toxine environnementale très sous-estimée qui mérite un examen beaucoup plus approfondi. »

Et comme expliqué plus haut, des cas spécifiques d’accumulation de certaines formes de tritium dans les organismes marins ou des sédiments ont été observés, sans en faire une généralité. Le principe de précaution voudrait que des recherche sérieuses soient menées à ce sujet avant de procéder à des déversements dans l’environnement marin.
Notons que la France déverse chaque année beaucoup plus de tritium dans la manche depuis les installation de La Hague en Normandie que ce qui est déversé au Japon depuis le site Fukushima…
Et notons qu’ en un an, la Hague déverse dans la Manche au moins douze fois autant de tritium que tout ce qui se trouve dans les réservoirs d’eau de Fukushima !


Notes
1. Pour les détails techniques, voir les notions de base sur la radioactivité et ce rapport sur le tritium.
— La demi-vie du tritium est de 12,3 ans. Il émet des rayons bêta (des électrons !), de faible énergie, soit 5,7 keV.
— Un Becquerel (1 Bq) c’est une désintégration par seconde d’un élément radioactif.
La production naturelle de tritium, dans la haute atmosphère a conduit à une quantité de planétaire de 3.5 kg, auxquels il faut ajouter les restes des explosion nucléaires dans l’atmosphère.
Cela parait surprenant, mais comme le tritium gazeux a une activité de 360 TBq / gramme, il n’y a que quelques grammes dans tous les réservoir d’eau de Fukushima destinés à être déversés dans la mer, et près de 50g / an déversés par La Hague; mais la dangerosité de la radioactivité correspondante n’est absolument pas négligeable (1 TBq c’est 1012 Bq), même après une forte dilution !
Les futurs réacteurs à fusion thermonucléaire (ITER et ses successeurs) devraient produire et consommer du tritium par centaines de kg. Il faut craindre des fuites de tritium bien plus sérieuses qu’à Fukushima, qui seront très difficiles à maîtriser, comme l’explique Yves Lenoir : Changer l’or en plomb, l’alchimie de la fusion nucléaire .
2. Ian Fairlie : Les dangers du tritium et Wikipédia : Radiotoxicité du tritium
Le Dr Ian Fairlie a travaillé à la régulation des risques radiologiques créés par les centrales nucléaires pour le compte du gouvernement britannique.
3. L’UE n’utilise pas ce chiffre comme limite sanitaire, mais plutôt comme valeur indicative pour investiguer et vérifier la présence éventuelle d’autres radionucléides artificiels.
4. Sources :
Japan: Regulatory Standards for Discharging Radioactive Materials into the Environment
Tritium in USA (NRC)
Canada’s Nuclear Regulator & ODWAC
Livre blanc sur le Tritium (ASN)
5. Résumé de ces erreurs : en prenant le détriment radiologique (risque de décès associé à une exposition aux rayonnements ionisants) plutôt que le taux d’incidence (personnes dont un cancer a été diagnostiqué), en faisant des arrondis douteux et en oubliant les plus vulnérables, les fœtus et enfants en bas âge. Et en étant fort laxiste par rapport aux normes concernant les polluants chimiques cancérogènes.
Voir le document 1 et le document 2 de la CRIIRAD.
6. Expérience de laboratoire (en 2013) avec des moules Mytilus edulis :
« L’accumulation de tritium organique dans les tissus des moules provenant du phytoplancton tritié démontre l’existence d’une voie de transfert du tritium pertinente pour l’environnement, même lorsque les concentrations dans l’eau sont réduites, ce qui renforce l’affirmation selon laquelle le tritium organiquement lié agit comme un polluant organique persistant. »
7. L’ASN reconnaît en pages 9 et 10 du livre blanc du tritium l’existence de certains cas où il y aurait des différences de concentration entre l’eau tritiée et le TOL, mais ne se prononce pas : « En conclusion, le groupe considère que seules des campagnes de mesures environnementales appropriées, définies selon une approche scientifique, permettront de lever les doutes et d’apprécier les différents facteurs en jeu, notamment la répartition du tritium entre les différents compartiments (y compris la matière organique des sédiments) et pour les espèces vivantes, de mieux définir les composantes libre et organiquement liée du tritium… ». Le tritium étant 3 fois plus lourd que l’hydrogène, il faudrait étudier la possibilité que l’absorption et l’élimination du tritium dans le TOL puisse être légèrement différentes de celles de l’hydrogène dans certains cas. La rareté des recherches sérieuses en ce domaine profite au doute et à ceux qui en bénéficient !
Voir aussi Wikipédia : Le métabolisme du Tritium
8. Accumulation du tritium dans les sédiments de la Loire



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Les coûts du nucléaire comparés à ceux des énergies renouvelables

Source : World Nuclear Status Report $1 = €0.9, soit $150 = €135.

Qu’est-ce que le LCOE ou Coût Actualisé de l’Énergie, et est-ce un outil complet et fiable ? Le plus souvent, ces estimations n’incluent pas les autres coûts associés à chaque type de système de production (équilibrage et interconnexions des réseaux électriques, dispositifs de stockage de l’énergie). Ils tiennent compte a minima du facteur de charge1, du coût de construction et de la durée de vie prévue. Il devrait normalement s’agir d’une analyse du cycle de vie complet, de la mine au recyclage.

– Le facteur de charge moyen est surestimé pour l’énergie nucléaire.

– Les coûts de stockage des déchets et de démantèlement sont sous-estimés pour l’énergie nucléaire.

– Les améliorations existantes et futures des techniques de recyclage des installations d’énergie renouvelable sont sous-estimées (batteries, pales d’éoliennes, panneaux solaires…).

– Le coût des ressources est très difficile à prévoir (les terres rares par exemple).

– Le coût du minerai d’uranium augmentera avec sa rareté attendue à moyen terme.

Coût des SMR
– Aucun projet n’est proche de la production. Source : WNISR22 p 26.
– Les estimations ne prévoient pas un coût inférieur à celui de la dernière génération nucléaire. Par exemple, Nuscale, aux États-Unis, approuvé par la NRC en 2020, ne sera pas actif avant 2029, et l’estimation des coûts n’est pas fiable.
– Qu’en est-il des économies d’échelle ? Ce point n’est pas pas pertinent à moins (peut-être ?) qu’ils n’en construisent des centaines en série, ce que nous ne voulons pas…
– La Belgique veut investir 100 millions d’euros dans la « recherche » de SMRs refroidis au plomb, en contradiction avec la loi de 2003 sur la sortie du nucléaire, et de toute façon ce sera trop tard (2040 ?) : des investissements plus efficaces dans les énergies renouvelables !

Les réacteurs vieillissants actuellement en production sont soumis à des coûts supplémentaires

Les anciens réacteurs sont censés être amortis, certains disent à tort qu’ils ont un coût annuel très inférieur à celui des nouveaux réacteurs nucléaires.

  • Les déchets augmenteront, donc les provisions pour la gestion des déchets augmenteront !
    Le coût de la mise en conformité des deux réacteurs avec les réglementations en vigueur en Belgique, y compris les nouvelles réglementations en matière de sécurité. Pour financer ces coûts d’investissement et d’exploitation et partager les recettes futures, la coentreprise Gouvernement/Engie gérera ces coûts techniques et contrôlera les coûts et les bénéfices générés par la production future d’électricité. … Estimation des coûts de mis à niveau  : entre 1,6 milliard et 2 milliards d’euros.
  • En France, le « grand carénage » coûtera entre 55 et 100 milliards d’euros pour 56 réacteurs (66 GW), soit entre 1 et 1,7 milliard par réacteur et 6 à 7 mois de travaux. (56 réacteurs et 66 GW). On ne connaît pas le coût réel de la réparation des soudures de nombreux réacteurs français, mais il est en tout cas inférieur au manque à gagner dû à la baisse de production et à la rupture d’approvisionnement.
  • Effet du dérèglement climatique => arrêts d’urgence ou catastrophes ! Trop d’eau, eau trop chaude, pas assez d’eau, tempêtes… ! Lors de la crue de 2020 à Tihange, le débit de la Meuse est passé de 300 à 1500 m³/s, très proche de la limite ! Avec 50 ou 100 m³/s de plus, la centrale de Tihange était à l’arrêt, voire pire…

Périodes d’inactivité dues à des problèmes inattendus en France

En 2022, la production nucléaire française a été de 70 % de la moyenne des 20 dernières années, le facteur de charge1 était seulement de 54 %, contre 73 % entre 2015 et 2019.
En raison du problème de corrosion des tuyaux et de la maintenance périodique, le 15 août 2022, 28 sur 56 étaient à l’arrêt. Certains réacteurs ont été ralentis ou même arrêtés l’été dernier pour des raisons climatiques également. Encore 17 à l’arrêt le 3 mars, et au moins 20 devraient l’être à l’été 2023, pour cause de maintenance + réparation du problème de corrosion des tuyauteries. EDF a eu une baisse de sa production nucléaire en 2022, donc EDF a été obligée de dépenser 29,1 milliards d’euros en rachat d’électricité sur le marché, importations comprises, sans compter les opérations techniques : 500 soudeurs américains embauchés, certains venant de Westinghouse, pour réparer les fameux tuyaux qui ont été rajoutés pendant la construction au brevet Westinghouse, et mal soudés. Une mauvaise image pour l’ingénierie française !

Facteurs de charge 1 des réacteurs nucléaires en Belgique 2016 => 2021

En 2018, un seul réacteur, Doel 3, a fonctionné du 12 octobre au 13 novembre, puis un deuxième (Tihange 1) a été ajouté jusqu’à la mi-décembre…
2015 (<= 50 %) : enquête sur les réacteurs fissurés et autres problèmes.
2018 (< 60 %) : pannes et dégradation du béton.
Engie prévoit une norme de 80 % (83 % en 2022).
En 2021, la Febeg annonce 96,7 %, le Forum nucléaire 92 % ! Nous reconnaissons que c’était une bonne année pour Engie, mais sur plusieurs années, la moyenne reste inférieure à 80 %.

Source du graphique : Febeg
Source du graphique : Febeg

Nos réacteurs belges sont également construits sur la base du même brevet PWR Westinghouse, ils sont donc proches des modèles français et des défaillances similaires pourraient donc se produire chez nous.

La question des déchets nucléaires n’est pas résolue !

En Belgique, 8 milliards d’euros ont été provisionnées pour le démantèlement des réacteurs.
Le SF2 est un bâtiment en construction pour le « stockage temporaire à sec » des assemblages de combustible nucléaire usé sur le site de la centrale nucléaire de Tihange. Il est prévu pour une durée de 80 ans. Trois autres bâtiments seront construits pour être utilisés à partir de 2029 lors du démantèlement des réacteurs.

Répartition des déchets radioactifs en Belgique. Données : Ondraf

Le projet est de stocker définitivement les déchets de catégories B et C dans des dépôts souterrains, à 400 mètres de profondeur, dans des couches géologiques d’argile ou de schiste. Cette étape n’interviendra pas avant quelques décennies. Les déchets de faible activité A et les autres déchets en attente d’enfouissement seront stockés par Belgoprocess à Dessel. En Belgique, contrairement à la France, les assemblages de combustible nucléaire usé ne sont pas censés être retraités !
Voir aussi le World Nuclear Waste Report et la consultation en cours en Belgique

Coût du stockage des déchets radioactifs en Belgique : au moins 12 milliards d’euros (Ondraf), étendu à un maximum de 15 milliards à charge d’Engie dans les accords entre le gouvernement Belge et Engie le 29/05/2023, soit plus de 2,5 milliards d’euros par gigawatt !
Le coût total « si on le fait tout de suite » est donc limité arbitrairement à un maximum de 23  milliards d’euros (presque 4 milliards par gigawatt); le reste, en cas de dépassement sera à charge de la Belgique. Le montant de 15 milliards sera versé dans le futur proche par Engie dans un fond géré par le gouvernement Belge, car la gestion des déchets durera des décennies, voire des siècles… Et les détails techniques de la gestion des déchets ne sont pas clairement définis à ce stade !

En Allemagne

  • Le démantèlement coûterait au moins 500 millions d’euros par réacteur ; il s’agit d’une estimation basse, qui devrait être d’au moins 1 milliard d’euros par gigawatt.
  • Aucune solution en vue pour l’enfouissement des déchets hautement radioactifs (27 000 m³). La reconversion d’une ancienne mine de sel a été abandonnée pour des raisons de sécurité.
  • Les autorités se sont donné jusqu’à 2031 pour trouver un nouveau site de stockage définitif pour une mise en service vers 2050…

Au total en Allemagne, le stockage des déchets radioactifs générés par près de soixante ans d’énergie nucléaire coûterait 176 milliards d’euros (parlement allemand) [environ 30 réacteurs nucléaires puissants pendant 60 ans].

USA : Le Wipp, site de stockage au Nouveau-Mexique, a eu quelques problèmes…

Le projet « pharaonique » français d’enfouissement des déchets nucléaires à 500 mètres sous terre à Bure (Meuse)3

  • 120 ans de travaux pour enfouir la production française de déchets de moyenne et haute activité, soit 85 000 m³. Pas de place pour la production future !
  • 500 hectares occupés au sol.
  • Des remblais équivalents au volume excavé du tunnel sous la Manche.
  • 270 km de tunnels, soit plus de deux fois la longueur du métro parisien.
  • Plus une quantité d’alcôves allant jusqu’à 50 mètres de long pour stocker les déchets de haute activité dans des conteneurs « irradiants » peu épais. Contrairement aux spécifications, en pratique aucune réversibilité ne sera possible…
  • 106 000 tonnes d’acier, soit l’équivalent de 14 tours Eiffel (7300 tonnes d’acier chacune).
  • 6 millions de mètres cubes de béton, soit, en tonnes, plus que la pyramide de Kheops !
  • Une usine de déconditionnement/conditionnement au sol de produits hautement radioactifs, des fuites en surface ne sont donc pas exclues !
  • Une gare ferroviaire recevant 2 wagons par semaine pendant des décennies.
  • Jusqu’à 822 mégawattheures d’électricité en moyenne par jour. Cela correspond à la consommation d’électricité d’environ 83 000 familles à 3500 kWh par an. Cela explique pourquoi il y aura une sous-station électrique de 400 000 volts sur 6 ha.
  • Impossible d’éviter les fuites à tous les niveaux de l’installation et leur propagation à l’extérieur de la centrale. Des incendies et des explosions ne sont pas à exclure… Les conteneurs irradiants en contact avec l’argile vont émettre des radiations qui vont provoquer une radiolyse de l’eau présente dans ces argiles et créer de l’hydrogène et des radicaux chimiques qui vont générer des acides, lesquels vont éventuellement générer des fuites. Certains (Jancovici & co) soutiennent que les déchets sont stockés sous les aquifères, mais cela n’exclut pas du tout la pollution. L’eau est pompée de la zone de stockage et peut s’écouler en surface ou par des puits et autres accès en pente creusés dans les couches géologiques, atteignant ainsi les aquifères ! Les couches géologiques de moins de 500 mètres seront transformées en une sorte de gruyère plein de trous.
  • La ventilation et l’extraction d’eau s’arrêteront à la fermeture des portes vers 2150… Que se passera-t-il ensuite ?
  • N’oublions pas le scandale de Stocamine, un stockage de déchets chimiques dans une mine de sel en Alsace, qui s’est révélé être un fiasco menaçant les nappes phréatiques de toute une région, malgré des promesses de réversibilité extrêmement difficiles à mettre en œuvre.
  • Le coût d’au moins 35 milliards est très très sous-estimé, et va très probablement gonfler vers ou au-delà de 100 milliards €, car comme en Belgique et en Allemagne, le coût atteindra au moins 2 milliards d’euros par gigawatt (et probablement plus ?)…

Coût des accidents possibles, dont la probabilité augmentera avec l’âge des réacteurs

Il pourrait atteindre des centaines de milliards d’euros, et compte tenu de la densité de population en Belgique, la ruine d’une partie importante du pays. Imaginez l’évacuation d’Anvers, de Namur, de Gand ou de Liège, voire de Bruxelles et de toutes les institutions qui y sont installées ! Où iront les réfugiés belges ?

Rotterdam est à environ 60 km, La Haye à 74 km, Maastricht à 40 km, Aix-la-Chapelle à
environ 60 km d’une centrale nucléaire belge. Les grands cercles ont 80 km de rayon.

En cas d’accident, la couverture d’assurance est insuffisante.

  • Le montant des dommages nucléaires dont l’exploitant est responsable s’élève à 700 millions d’euros pour chaque accident nucléaire en Belgique, selon la Convention de Paris de 1960, amendée en 1985 et complétée en 2022 : 700 millions d’euros par installation et par accident (70 millions d’euros pour les installations « à risque réduit »)
  • 80 millions d’euros pour les accidents survenant lors du transport de substances radioactives.
  • À cela s’ajoutent deux contributions supplémentaires : celle de l’Etat de l’installation, soit 500 millions d’euros, et celle des États parties à la Convention de Bruxelles, soit 300 millions d’euros.

Les fonds disponibles pour l’indemnisation des victimes d’un accident nucléaire en Belgique s’élèvent donc à 1,5 milliard d’euros.

Et quelles sont les indemnisations possibles pour les pays voisins, par exemple les Pays-Bas et l’Allemagne ?

Il n’y a tout simplement pas de couverture en cas d’accident nucléaire grave !

Notes :

  1. Le facteur de charge est le rapport (%) entre la quantité réelle de kilowattheures (kWh) fournie par un système au cours d’une période donnée et le nombre total de kilowattheures qui pourrait être fourni par le système au cours de cette période donnée.
  2. Consultation publique en cours sur le démantèlement de T2 (qui devrait s’arrêter fin juin 2023)
  3. Source : le rapport complet sur Bure (160 pages), notre article et les informations de l’Andra.
  4. Par rapport au climat, il est clair qu’un euro investi dans une énergie renouvelable économise bien plus de CO2 et de GES qu’un euro investi dans le nucléaire !
  5. Cet article a été mis à jour le 01/07/2023.

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À propos de la BD « Le monde sans fin »

En 2021, paraissait une BD « éducative » sur l’énergie : « Le Monde sans fin, miracle énergétique et dérive climatique »  octobre 2021, de Jean-Marc Jancovici (JMJ) et illustré par Christophe Blain. Ce livre a eu un grand succès (plus de 1 000 000 d’exemplaires vendus en mai 2024), mais à notre avis c’est une œuvre magistrale de désinformation pronucléaire et de dénigrement des énergies renouvelables.

Tout n’y est pas à jeter, il est clair qu’il va falloir consommer moins et mieux et économiser l’énergie (c’est la sobriété), et produire proportionnellement plus d’électricité dans le futur. Le tout est donc de savoir comment !

Les arguments utilisés dans Le Monde sans fin, même caricaturaux, se retrouvent dans une version légèrement édulcorée dans les débats actuels sur les choix énergétiques en France et en Belgique. JMJ ne dit pas que des bêtises, mais lorsqu’il aborde la réforme nécessaire du « mix électrique », il devient clair qu’il agit en lobbyiste pronucléaire1 souvent en détournant des chiffres de manière à pénaliser les énergies renouvelables2 et promouvoir le nucléaire, tout en déniant même les dangers de la radioactivité et l’absence de solution pour les déchets nucléaires.

Certains calculs à propos du renouvelable sont basés sur des données déjà obsolètes, ou qui vont très bientôt être remises en cause par le progrès technique, bien plus dynamique en ce domaine que dans l’industrie électronucléaire !

Lire aussi l’intéressante critique faite par Pierre-Guy Thérond, Vice-Président  New Technologies chez EDF EN, ainsi que « Le Corrigé » de Ghislain Dubois et la critique de Stéphane His !

Quelques « oublis », dénis et informations biaisées

  • Les centrales belges ne sont pas aux normes post-Fukushima concernant le risque de chutes d’avions, du moins pour les gros porteurs qui passent au-dessus de Bierset. Un crash d’avion volontaire, ou non pourrait briser l’enceinte d’un réacteur3, ou détruire le futur site de stockage de déchets nucléaires à Tihange.
  • Risque du terrorisme ou d’une prise d’otage à l’intérieur d’une centrale.
  • Le vol de matières très radioactives. Faire une « bombe sale », pour répandre ces matières dans des zones habitées, est à la portée d’un groupe terroriste.
    Pour info, l’ingestion ou l’inhalation d’un milligramme de plutonium 239 est mortelle, un millionième de gramme peut déclencher un cancer, car cet élément peut rester quasiment à vie dans certains organes…
  • Une guerre de haute intensité dans un pays doté de centrales nucléaires : il suffit de suivre ce qui se passe en Ukraine (Zaporijja), et pour rappel en octobre 2020 l’armée de l’Azerbaïdjan a menacé la centrale arménienne de Metzamor d’un tir de missile ; heureusement, le missile a été intercepté avant de toucher sa cible !
  • Une baisse drastique du niveau d’une rivière lors d’une « super sécheresse » qui empêcheraient de refroidir les réacteurs. Tout comme les inondations, les tempêtes, et une hausse du niveau de la mer, rendant par exemple Gravelines inutilisable, voire pire… Le nucléaire est très vulnérable aux dérèglements climatiques.
  • Les réserves d’uranium nous assurent à peu près un siècle de combustible avec le parc actuel, soit un peu plus de 400 réacteurs en fonctionnement. Comme le nucléaire produit 10 % de l’électricité mondiale, et à peu près 4 % de l’énergie primaire consommée sur la planète, ce n’est pas une solution pour agir sur le CO2 au niveau planétaire. Multiplier le parc actuel même par un facteur 5 est irréalisable, et épuiserait les ressources en uranium rapidement.
  • Le temps de mise en œuvre est relativement long. Flamanville est en construction depuis 2007. Les nouveaux projets nucléaires français ne seront pas disponibles avant 2035-2040, alors que l’urgence climatique nous demande une efficacité dans les 10 ans. Et toute nouvelle solution nucléaire industrielle demande 15 à 20 ans pour passer au stade de la production en série.
  • Le coût du nucléaire ne fait qu’augmenter, à la suite, en partie, des règles de sécurité post-Fukushima. En comparaison, les coûts de l’éolien ont baissé de 70 % entre 2009 et 2019, ceux du solaire de 89 % quand ceux du nucléaire augmentaient de 26 %. Un euro investi dans le nucléaire économise donc moins de CO2 que le même euro investi dans les renouvelables et les solutions annexes, par exemple l’investissement du gouvernement Belge dans les système de stockages4.
  • Le problème des déchets n’est absolument pas résolu. Le coût financier et écologique (production de CO2) de l’enfouissement est énorme et bien caché, et sera en grande partie transmis aux générations futures !
  • Le lien historique et encore actuel entre le nucléaire civil et le nucléaire militaire. Notez que les pays les plus acharnés à maintenir leurs centrales électronucléaires sont ceux qui ont l’arme nucléaire, ou qui cherchent à l’obtenir.
  • Seulement 50 morts à Tchernobyl, aucun effet sur la santé des habitants à Fukushima dû à la radioactivité ? Allez demander aux Ukrainiens, Biélorusses et Japonais qui en souffrent encore aujourd’hui. Les sources « officielles » ont été manipulées par les agences censées nous protéger, et l’OMS, dès sa fondation, n’a pas le droit d’émettre un avis sur l’effet de la radioactivité sur la santé sans l’accord de l’AIEA, association pour la promotion de l’énergie nucléaire. L’UNSCEAR n’est pas neutre.

Conclusions

Le nucléaire peut-il nous aider ? Prolonger les réacteurs existants expose à des coûts de réparation, des arrêts imprévus (voir la France) et en construire de nouveaux, c’est la source d’énergie la plus chère…

Il est beaucoup, beaucoup plus efficace, facile, économique et sans risques, d’investir dans un mix d’énergies renouvelables intermittentes et non intermittentes (biomasse, méthanation, méthanisation, hydrogène vert, ammoniac de synthèse…) et dans des capacités de stockage et de maîtrise de la demande.

Un euro investi dans ces solutions alternatives économisera plus de gaz à effet de serre qu’un euro investi dans le nucléaire.

Au niveau mondial, le nucléaire correspondait à 4,25 % de la consommation d’énergie totale en 2021 : s’il fait courir à l’humanité un danger extrême, le nucléaire est en réalité une énergie marginale sur terre, en déclin, et donc tout à fait incapable de « sauver le climat ».

Critique détaillée de la BD :

Page 131 : Contrairement, par exemple, aux centrales solaires, la concentration de l’énergie nucléaire économise de l’espace et consomme moins de métal, de ciment, etc. Avec de la sobriété, et beaucoup d’installations petites à moyennes, sur les toits de parking, d’usines, les canaux, voire les façades et les vitrages. Et stocker de l’électricité ou produire des carburants de synthèse par exemple et de l’hydrogène vert. Est-ce que ça prend beaucoup de place ? Eh oui ! C’est une logique décentralisée, mais l’argument de JMJ est du pur enfumage, voir le texte de Stéphane His ! « Centralisme énergétique », ou décentralisation citoyenne ? Nous voyons ici que JMJ vit dans l’Ancien Monde, celui de la « centralisation ». C’est une vision philosophique héritée du « centralisme bureaucratique » qui a également été à la base de la gestion de l’URSS. L’énergie part de centrales et est distribuée par un ensemble de « réseaux en étoile ». Il est clair que les énergies renouvelables sont inadaptées à ce réseau de distribution, non par nature, mais par le conservatisme des tenants de « l’ère centralisée », qui y ont un intérêt, comme les sponsors de JMJ. Ce centralisme, surtout en matière nucléaire, est lié à un mode politique de gestion autoritaire où les décisions sont imposées du sommet de l’État vers la base, souvent sans réelle consultation des citoyens. La solution est dès maintenant de développer des réseaux locaux et des communautés d’énergie, où la consommation est proche de la production, donc aussi avec moins de pertes. Le surplus doit bien sûr être partagé à moyenne et longue distance par les réseaux existants, pour profiter de l’effet de « foisonnement » 5 de toutes les énergies disponibles, car par exemple à un moment donné le vent peut souffler en Allemagne plus que chez nous. Ceci me rappelle les débuts de l’informatique, tout était misé sur des « mainframes », ordinateurs géants centralisés accessibles à distance par des terminaux quasi stupides, toute la logique et l’information étaient centralisées. Petit à petit, les réseaux locaux sont apparus, puis se sont reliés entre eux, et une bonne part des « mainfraimes » ont disparu. Les gros ordinateurs ont toujours leur utilité, mais il y a aussi presque partout des réseaux locaux qui permettent de rapprocher la production, le stockage et l’utilisation de l’information, tout en maintenant un lien à grande distance. Il me semble que la production, la distribution et l’utilisation de l’énergie devraient suivre le même chemin, et la BD de JMJ ne me semble pas préconiser cette philosophie ! Face au problème de l’intermittence, il y a donc des solutions ! Il ne faut pas, comme JMJ, comparer ces moyens deux à deux (« En Belgique, si on n’utilisait que l’éolien et le solaire pour produire de l’électricité, il faudrait X tonnes de batteries », ou « il faudrait une éolienne tous les kilomètres carrés »), ce qui donne bien évidemment des résultats absurdes. Non, il faut construire de « modèles », c’est-à-dire des représentations du monde rigoureuses mettant en présence l’ENSEMBLE de ces modes, en faisant varier les hypothèses, et en tenant compte du progrès technique et de l’évolution des coûts. On nous dit que le nucléaire est en compétition avec le charbon, alors qu’en réalité il est en compétition avec une production électrique basée sur un « mix » 100 % renouvelable. C’est pour cela que les pronucléaires tentent de saper les énergies renouvelables ! Oui, il faut un mix « pilotable » de sources d’énergie, de partage et de stockage, et donc en finir à terme avec l’utilisation du gaz fossile comme seule vraie énergie pilotable pour répondre aux pics de consommation. Le nucléaire est une énergie de base, mais pas vraiment pilotable (flexible), on ne peut l’arrêter et le remettre en marche rapidement (ou le ralentir très fort et puis ré-augmenter la puissance).
C’est très mauvais de faire subir des chocs thermiques trop fréquents à un réacteur, cela accélère son vieillissement. C’est peut-être une des raisons pour lesquelles les réacteurs Français vieillissent plus vite que leurs équivalents PWR US, construits sur base des mêmes brevets Westinghouse car ils sont moins souvent soumis à ces chocs, en dehors des arrêts pour maintenance.

Page 130 : À 3 % d’uranium 235 dans les réacteurs nucléaires français, ça ne risque pas d’exploser. D’accord, ce n’est pas une bombe nucléaire. N’empêche que Fukushima et Tchernobyl ont bien explosé pour d’autres raisons que la réaction en chaîne, et même sans explosion la fusion du cœur peut endommager les confinements et conduire à la dispersion dans l’environnement de gaz et de matières radioactives, comme à Three Miles Island en 1979. Des gaz radioactifs se sont aussi échappés de l’EPR de Taishan en Chine en 2021, certes en faibles quantités. Mais Tchernobyl a dispersé au moins cent fois plus de matières radioactives que la bombe d’Hiroshima…

Page 132 : Le nucléaire émet très peu de CO2 par kilowattheure produit (6 g de CO2/Kwh). C’est la version française, le GIEC propose 12 g. Nous ne savons pas comment le GIEC a obtenu ce chiffre. Nous pensons qu’il est sous-évalué et qu’en pratique le nucléaire ne produit pas moins que les renouvelables, mais bien sûr beaucoup moins que le gaz. Il faudrait vraiment tenir compte du cycle complet, donc, y compris la gestion des déchets dans le futur, la réhabilitation des zones minières qui attentent à la santé des populations, en Afrique, mais aussi en France… Le nucléaire ne sauvera pas le climat, mais le dérèglement climatique nuit fortement à l’industrie électronucléaire. Une baisse drastique du niveau d’une rivière lors d’une « super sécheresse » qui empêcheraient de refroidir les réacteurs, obligeant à les arrêter. Tout comme les inondations, les tempêtes, et une hausse du niveau de la mer, rendant par exemple Gravelines inutilisable, voire pire…

Page 135 : En dessous de 200 mSv par an (de contamination), il n’y a pas d’effet observable sur la santé, même à très long terme. Faux. Une faible dose c’est simplement une faible probabilité de dégâts, plus le temps passe, plus le risque augmentera, et les effets organiques peuvent se manifester plus tard et donc pour un individu donné il sera souvent difficile d’établir juridiquement la cause de la maladie. Autour de Tchernobyl et de Fukushima, les autorités compétentes n’ont pas fait d’évaluation statistique transparente… Bien sûr, il faut une forte dose pour que des effets soient visibles immédiatement et donc reliés indiscutablement à la contamination, d’où les « 50 morts » annoncés à Tchernobyl au début et le « zéro mort » à Fukushima.

Deux raisons empêchent que Tchernobyl arrive en France : – Il n’y a pas de graphite dans le cœur de nos réacteurs. – Nos centrales disposent d’un « recombineur d’hydrogène » Manipulation : la catastrophe nucléaire française ressemblera bien plus à celle de Fukushima qu’à celle de Tchernobyl ! Et le « recombineur d’hydrogène » ne peut gérer que de petites quantités de ce gaz, pas sûr qu’en cas d’accident cela soit suffisant !

Les réacteurs français sont à « sécurité passive » car ils sont à eau pressurisée. Si l’eau fuit, la réaction s’arrête. C’est ce qui manquait à Tchernobyl. Si l’eau fuit, le refroidissement s’arrête aussi, comme à Fukushima, et si la fuite n’est pas maîtrisée, il y a un gros risque de catastrophe : incendie, bulle d’hydrogène, fonte du cœur, explosion…

Près d’une centrale nucléaire, la radioactivité augmente de 0,02 mSv. Beaucoup plus en cas d’incident, d’accident et, pire, en cas de catastrophes comme celles de Tchernobyl et Fukushima. Ces dernières ont entraîné le déplacement massif de centaines de milliers d’habitants dont beaucoup seraient effectivement décédés en restant sur place. La radioprotection n’est pas simple. Il ne suffit pas d’additionner des becquerels6, cela dépend du radioélément et son énergie, sa demi-vie, la contamination interne ou externe, de sa durée de persistance dans le corps (demi-vie biologique). Le tritium est peu offensif en irradiation externe, est de faible énergie, mais dangereux en contamination interne, car une fois lié à l’eau ou à des composés organiques il peut « tirer à bout portant » partout à l’intérieur des cellules… Le radon est « naturel », mais est le troisième responsable des cancers du poumon après le tabac et l’amiante… Le césium 137 affaiblit toujours les enfants d’aujourd’hui à Tchernobyl et provoque des problèmes cardiaques, car il s’accumule dans les muscles. On ne peut pas comparer le K40 (potassium radioactif) présent dans le corps humain (oui plusieurs milliers de désintégrations par seconde), et l’effet de certains produits de fission de l’uranium. Le plutonium (dont les rayons alpha sont arrêtés par une feuille de papier) est létal à 1 mg, et cancérogène à 1 µg en contamination interne ; il reste quasiment à vie dans certains organes, etc. Pour les détails, voir ce texte sur la radioactivité, en particulier la page 14 pour le potassium, et ce document sur le tritium.
Et donc, même s’il semble qualifié dans d’autres domaines, il apparaît que JMJ ignore les bases de la radioprotection !? À choisir, je fais confiance à la CRIIRAD et aussi à Yves Lenoir, qui a plus 40 ans d’expérience dans ce domaine, et a rencontré en Ukraine et Biélorussie les médecins sérieux qui étudient les effets de la catastrophe sur la santé humaine (Institut Belrad, « Les Enfants de Tchernobyl », etc).

Page 137 : Les réacteurs d’EDF n’ont pas de vocation militaire.
Rien n’empêche de récupérer le plutonium produit par un réacteur civil pour en faire des bombes. C’est même à ça que servaient les premiers réacteurs électronucléaires français.

Page 138 : L’UNSCEAR est au-dessus de tout soupçon. Il est clair que le but de ces organismes soi-disant indépendants était et reste le maintien et la promotion de l’énergie nucléaire, ils sont juges et parties, et ne se sont pas opposés aux autorités locales, par exemple en Biélorussie…. Ils protègent leurs intérêts. Il y a d’autres sources d’information sur les dégâts humains et matériels à Tchernobyl, notamment les experts et médecins indépendants, qui ont souvent été poursuivis par les autorités officielles de leur pays. Je ne ferais pas confiance à l’administration d’Alexandre Loukachenko !

Page 139 : Tchernobyl n’a entraîné qu’une trentaine de morts à bref délai. 6000 enfants ont eu un cancer de la thyroïde, mais ça se soigne bien. « Si l’on enlève les évaluations les plus hautes et basses, on se retrouve avec une fourchette de 4 000 à 200 000 morts. L’ONU en 2006 retenait une fourchette de 4 000 à 93 000. » C’est déjà beaucoup trop, et à notre avis en dessous de la réalité, il y a eu une censure des autorités locales, approuvées par l’UNSCEAR et l’AIEA…

Page 140 : Le stress dû à Tchernobyl a fait plus de dégâts que Tchernobyl lui-même. Faux ! Oui, il y a eu du stress, mais surtout de vrais dégâts matériels et humains. Lire « La Supplication » de Svetlana Alexievitch , qui raconte ce qui est arrivé aux victimes de la catastrophe de Tchernobyl !

Page 140 : La zone d’exclusion de Tchernobyl est devenue une réserve naturelle. Le gain pour la biodiversité est sans appel. JMJ : « En France — car c’est loin d’être pareil partout — Fukushima aura surtout été un problème médiatique majeur, avant d’être un désastre sanitaire ou environnemental majeur. Cet embrasement médiatique n’est pas du tout en rapport avec l’importance de cette nuisance dans l’ensemble des problèmes connus dans ce vaste monde. Du point de vue des écosystèmes, et ce n’est pas du tout de l’ironie, un accident de centrale est une excellente nouvelle, car cela crée instantanément une réserve naturelle parfaite ! La vie sauvage ne s’est jamais aussi bien portée dans les environs de Tchernobyl que depuis que les hommes ont été évacués (la colonisation soviétique, à l’inverse, a été une vraie catastrophe pour la flore et la faune). Le niveau de radioactivité est désormais sans effet sur les écosystèmes environnants, et le fait d’avoir évacué le prédateur en chef sur cette terre (nous) a permis le retour des castors, loups, faucons, etc. » Source : La Tribune, 20 Févr. 2012. Détails complémentaires sur l’ignorance de JMJ sur les effets des faibles doses sur la biodiversité dans ce rapport, en particulier à la page 18 ! Il existe plus d’une centaine d’articles scientifiques de haut niveau sur les effets des fortes et faibles doses de radioactivité sur la faune et de la flore à Fukushima et Tchernobyl.

Page 141 : Le nuage radioactif de Tchernobyl s’est rapidement dilué en s’éloignant de l’accident. Dilué, oui, un peu, mais la pollution est partie très loin de l’Ukraine, y compris chez nous, et les retombées, à certains endroits, étaient très mauvaises pour la santé humaine ! Et certains organismes, notamment les champignons, peuvent accumuler certains radionucléides, comme le césium 137, et dépasser les normes en France 30 ans après Tchernobyl !

Page 141 : Selon le rapport de l’UNSCEAR, la catastrophe de Fukushima n’a entraîné aucune conséquence sanitaire (pas de cancers, pas de malformations à la naissance). Toujours ce même organisme constitué de « gens du nucléaire ». Des informations plus nuancées dans cet article de Reporterre .

Page 144 : En réduisant le nucléaire, les Allemands reviennent au charbon. En aggravant le réchauffement climatique, ils vont provoquer plus de morts qu’un accident nucléaire.
La consommation de charbon a de fait augmenté légèrement entre 2011 et 2013, mais la part du charbon (houille et lignite) dans la production allemande d’électricité est passée de 44 % en 2013 à 24 % en 2020. puis diminué depuis, au fur et à mesure de la sortie du nucléaire ! L’Allemagne est en train de progresser vers le zéro carbone !!! La part du renouvelable est passée de 16 % à 40 % entre 2010 et 2021, et déjà 52 % en incluant les autres sources bas-carbone. La part du nucléaire est passée à moins de 7 % et s’arrête complètement en avril 2023. Les énergies fossiles sont, elles, passées de 60 % à 47 %. Malgré la décision récente de maintenir certaines centrales au charbon et de l’augmenter ces derniers mois, l’Allemagne continue à vouloir sortir du charbon en 2030 et a arrêté ses 3 derniers réacteurs nucléaires en avril 2023. Voir tous les mix énergétiques d’électricité sur le site d’Ember !

Page 145 : Le nucléaire rend moins dépendant de l’étranger que les énergies fossiles. Faux. Loin du mythe de la France nucléaire triomphante, imposé dans l’opinion publique depuis des décennies, le nucléaire français et Belge est très dépendant de l’étranger. D’abord, 100% du combustible nucléaire, l’uranium, est importé. Par ailleurs, malgré la guerre en Ukraine, la France a besoin de la Russie pour l’enrichissement du combustible à partir de combustibles usés selon une technique que seuls les Russes maîtrisent. Par ailleurs, du fait des graves défauts détectés sur les réacteurs français (corrosion sous contrainte), EDF a été obligée de recruter à grands frais des soudeurs américains pour mener à bien des réparations que le nucléaire français est incapable de faire lui-même…

Page 146 : Le nucléaire produit peu de déchets radioactifs de haute activité et à vie longue. Ils tiennent tous dans une piscine olympique. On ne peut pas les entasser, il faut des emballages volumineux et séparés. Si c’était si simple, pourquoi , dans le site d’enfouissement de Bure, prévoir l’excavation de 11 millions de m³, de 270 Km de galeries, dont 25 Km pour les déchets de haute activité, et une surface occupée en sous-sol de 15 km² ?

Page 147/148 : L’enfouissement des déchets est sûr. À 400 m de fond, ils sont sous les nappes phréatiques (qui sont à 20 m de profondeur). Oui, mais à Bure de l’eau est pompée du dessous vers la surface et ces eaux, notamment des nappes phréatiques, peuvent redescendre dans la zone de stockage à 400/500 m. La structure des installations, des puits, des descenderies favorise ces fuites d’eau. Certaines argiles proches de la zone des déchets sont perméables à l’eau et pourraient transporter des fuites radioactives vers le bassin Parisien. Tous les détails sur Bure.

Page 148 : Il reste assez d’uranium (sur Terre) pour faire fonctionner le parc actuel de réacteurs quelques centaines d’années. Ce serait plutôt une centaine d’années au maximum. Et donc si on en construisait par exemple quatre fois plus, c’est fini dans 25 ans…

Page 149 : Le surgénérateur est une technique maîtrisée (…) Il multiplie par 100 l’énergie extractible de l’uranium. On a donc assez d’uranium pour des milliers d’années. Quarante ans plus tard, on les attend toujours… Aucun surgénérateur n’est en fonctionnement pour le moment, beaucoup ont été abandonnés pour des raisons de coût ou de sécurité.

Page 149 : Les gens craignent plus les déchets nucléaires qui n’ont jamais tué que, par exemple, les accidents de voiture. Les accidents tuent maintenant, oui. Mais les déchets nucléaires menacent la biosphère et les générations futures pour des milliers d’années…

Page 150 : Le charbon tue chaque année dans le monde l’équivalent de la ville de Grenoble. Remplaçons le plus vite possible le charbon par un mix renouvelable ! Notons que la Belgique ne produit plus d’électricité à base de charbon.

Page 151 : Les écologistes persistent à critiquer le nucléaire car il leur est difficile d’admettre qu’ils se sont trompés. Notons que la part du nucléaire dans la production mondiale d’électricité est passée de 17 % en 2000 à 9 % en 2022. Et la part du nucléaire était égale à 4,25 % de l’énergie totale consommée sur la planète en 2021. Ceux qui y voient une énergie d’avenir sont en train de nous tromper d’autant plus que des quantités de réacteurs arrivés en fin de vie vont fermer dans les 20 ans qui viennent.

Page 160 : Le nucléaire a moins d’inconvénients que les énergies renouvelables. Oui, la production nucléaire convient au pouvoir politique et industriel qui peut contrôler cette énergie très centralisée et maintenir les citoyens dans l’ignorance de ce qui se passe. Le nucléaire civil est peu compatible avec la démocratie et a été au début imposé comme un complément indispensable au nucléaire militaire. Les énergies renouvelables peuvent être réparties un peu partout sur le territoire, décentralisées, déployées par les collectivités territoriales en concertation avec les habitants…

Page 161 : Le nucléaire est le parachute indispensable pour freiner la chute que nous imposera la décroissance obligée. Le nucléaire est, en lui-même, un exemple de décroissance : comme déjà expliqué ci-dessus, la part du nucléaire dans la production mondiale d’électricité s’est effondrée de 17 % en 2000 à 9 % en 2022, et est descend à 4 % de l’énergie primaire, la chute continue…

1. Rappelons qu’au moins une de ses initiatives, « The Shift Project », a été financée par EDF, Bouygues, Vinci, tous acteurs ayant des intérêts dans le secteur nucléaire…

2. Il faudrait aussi clarifier et faire connaître la vraie production de CO2 du nucléaire, qui est à notre avis sous-estimée. Le chiffre utilisé par les pronucléaires de 6 g CO2/Kwh est inférieur à celui du GIEC 12 g CO2/Kwh, qui est lui-même contestable, d’autres chercheurs parlent de 66 g CO2/Kwh voire plus… Bien sûr, les émissions de CO2 doivent être comptées par cycle entier, mais alors il faudrait compter aussi les dégâts miniers, la pollution qui y est liée, ses effets sur la santé dans les zone d’extraction en France, en Afrique et ailleurs, le coût de cette dépollution nécessaire, et le coût (présent et futur !) de la gestion des déchets !

3. Tihange, à 16 km de l’aéroport de Liège-Bierset, se trouve sur une ligne aérienne assez fréquentée. Des gros porteurs (Boeing 747) passent fréquemment très près de la centrale et à moyenne altitude (2500 pieds, soit 840 mètres !). Suivant la législation, ils ne peuvent pas passer juste au-dessus, mais, en pratique, jugez par vous-même en regardant cette vidéo.

4. La capacité du stockage installé en Belgique va augmenter d’ici 2024.

5. Effet de foisonnement : « La réduction des fluctuations temporelles de l’intermittence et de la variabilité de la production d’énergie par la multiplication de sources éloignées »

6. Nombre de désintégrations par seconde d’un radioélément spécifique : par exemple un becquerel de césium 137, c’est une désintégration par seconde de cet élément. Additionner les becquerels d’éléments différents, au niveau de l’évaluation des risques, ce n’est pas très pertinent, et c’est encore moins clair si on ne précise pas si la contamination est externe ou interne.

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Éléments de réponses à la consultation sur la prolongation de Tihange 3 (T3) et Doel 4 (D4)

Une consultation est actuellement en cours jusqu’au 20 juin 2023, et elle n’est pas limitée aux citoyens Belges. Le site propose deux documents, un résumé de 23 pages et une évaluation plus complète de 409 pages.

Le résumé simplifie trop la situation et omet de nombreux points, dont le rejet de nombreux produits radioactifs, (surtout le tritium et l’iode 131) lors du fonctionnement normal. Visiblement, les auteurs misent sur le fait que presque tout le monde se limitera au résumé tronqué, mais non, « on ne vous cache rien, allez lire les 409 pages techniques qui montre qu’aucune norme n’a été ou ne sera dépassée »….

Fin du Nucléaire suggère cependant de lire le résumé, et ensuite de répondre aux assertions de ce résumé concernant les incidences sur l’environnement, en vous inspirant de quelques un des arguments suivants, et de donner votre avis sur cette prolongation.
La page accepte une réponse assez longue, mais il est conseillé de se limiter à quelques arguments.

  • Le dossier résumé nous dit que les licences d’exploitation de KC Doel (D4) et CN Tihange (T3) seraient respectées, car la dose de radiation reçue par la population durant le fonctionnement normal serait principalement déterminée par les rejets gazeux de carbone 14 (C-14). C’est incomplet, car le dossier complet d’évaluation parle du rejet (parmi d’autres radionucléides) de tritium et d’iode radioactifs dans l’air et de tritium dans l’eau de la Meuse à Tihange. Le graphique de la page 380 montre qu’il s’agit de rejets totaux de l’ordre de 50 TBq de tritium dans l’air et dans l’eau à Tihange. Certes, c’est en dessous des normes, mais une telle quantité n’est pas négligeable, et les effets du tritium sur la santé humaine sont sous-estimés, voire niés, par l’industrie nucléaire. Ce produit est extrêmement difficile à filtrer à l’échelle industrielle, et si les normes étaient à un niveau plus en rapport avec la santé humaine, cela poserait des problèmes insolubles à l’industrie électronucléaire, ce qui à mon avis motive leur déni à ce sujet ! Oui, le C-14 et le tritium peuvent aussi être d’origine naturelle, mais un réacteur arrêté, c’est un plus pour la santé de la population ! Car les estimations en milliSievert/an ne parlent que des effets de la contamination externe. Si les éléments son ingérés ou inhalé, l’effet est différent suivant l’élément, qui reste plus ou moins longtemps dans l’organisme et y cause des dégâts spécifiques bien plus importants que la contamination externe !

  • Extrait du dossier résumé : « La contamination par des radionucléides de longue durée de vie tels que le Cs-137 est très limitée. L’impact transfrontière de tous les accidents considérés pour Tihange 3 est très limité en raison de la distance avec les pays voisins ! »!?
    Un accident grave avec rupture des barrières de confinement pourrait très bien répandre de l’uranium 235 ou 238, du plutonium 239, du cesium137, de l’iode 131 et d’autre produits de fission bien au delà des frontières belges, suivant la direction des vents ! Il suffit de voir comment les vents ont soufflé à Fukuhsima en 2011 et à Tchernobyl en 1986… Doel est moins de 4km de la Hollande (et 15 km de la ville d’Anvers), Tihange est à 65 km de la ville d’Aachen en Allemagne, 25 km de la ville de Liège, moins de 60 km de la frontière Française…. Les pilules d’iode, prises à temps en cas d’accident, idéalement trois heures avant le passage du nuage mais pas plus de 3 ou 4 heures après, ne protègent que du cancer de la thyroïde, pas de la leucémie par exemple…
    La présentation de cette consultation semble limiter les risques à la Belgique, et marginalement à la Hollande : nous exigeons une consultation internationale impliquant au moins les pays limitrophes.

  • Citation du dossier résumé à propos du dérèglement climatique : « Dans la perspective temporelle de la prolongation de la durée de vie, les deux sites ne sont pas vulnérables non plus aux conséquences du changement climatique, et cette situation est indépendante de la prolongation ou non de la durée de vie de Doel 4 et de Tihange 3….. Les modifications et rénovations futures doivent être suffisamment résistantes aux inondations et au climat pour absorber les conséquences de précipitations plus intenses à l’avenir et ne pas transférer les inondations à la zone environnante ». C’est complètement erroné, le dérèglement climatique est déjà là : en 2020, la limite de débordement du mur de protection a été évitée d’extrême justesse, le débit de la Meuse est passé de 200 à 1500 m³/s à Tihange, à quelques dizaines de m³ près, la centrale était mise à l’arrêt, voire inondée !
    Le nucléaire est très sensible aux dérèglements climatiques : la sécheresse qui implique une surchauffe inacceptable des rivières ou une rupture approvisionnement électrique,par manque d’eau de refroidissement, les inondations qui impliquent également un arrêt de la production, voire une catastrophe en cas de panne du système de refroidissement (arrêt de diesels de secours comme à Fukushima). De fait il va falloir investir encore plus dans la protection vis à vis des inondations et du contrôle des eaux sortant du site, dans toutes les circonstances. Que va rapporter cet investissement ?

  • Risque d’accident majeur ? Nous lisons dans le dossier résumé qu’ « on peut affirmer que la perception du risque existe, mais qu’il n’y a pas de lien démontrable avec les effets psychosomatiques » .
    Le problème n’est pas psychosomatique, il ne s’agit pas d’un « problème de perception » : le risque existe réellement, tout comme dans les 6 ou 7 accidents graves du passé : Tchernobyl 1986, Fukushima 2011, mais aussi Mayak/Kyshtym 1957 et 2017, Windscale 1957, Three Miles Island 1979, St Laurent de eaux 1969 et 1980, Tokaï Mura en 1997… et la liste n’est pas exhaustive, certains incidents en URSS et aux USA ont été censurés, comme la fois ou des blocs de plutonium ont été rassemblés par erreur à Los Alamos en aout 2011 et on failli déclencher une réaction nucléaire aux conséquences imprévisibles… Plus nos réacteurs vieillissent et plus le risque d’accident sera élevé. Rappelons-nous les fissures dans T2/D3, et les problèmes actuels en France de corrosion sur des tuyaux destinés au refroidissement… Le territoire belge étant petit et très peuplé, quasi tout le territoire et les régions avoisinantes seront pollués par les éléments radioactifs, le dossier attaché est vraiment trop optimiste voire trompeur, l’effet des grandes catastrophes du passé ne se sont pas limitées à moins de 60 ou 80 km…

  • Impact de la prolongation sur la production de déchets et de combustibles usés : augmentation de 9 % des déchets en cas de prolongation qui seront stockable sur le site SF2 à Tihange «en attendant de savoir quoi en faire »… Mais le problème est là : à ce jour, personne ne sait ce qu’on va en faire, après leur passage dans le SF2 à Tihange !
    – Combien de temps les combustibles usés vont-il rester dans les piscines ?
    – Combien de temps les combustibles usés vont-il rester ensuite dans le SP2 ?
    – Que va-ton en faire après et combien de temps cela va-t-il durer ?
    – Combien cela va-t-il coûter ?
    A combien de milliards d’Euros Engie veut-il placer le plafond à partir duquel les futurs contribuables belges paieront les frais de gestion des déchets et de démantèlement ?

  • Qui va payer les frais de démantèlement des deux réacteurs prolongés ?
    Pourquoi l’État Belge devrait-il participer à ces frais ? Et « le démantèlement d’un seul ou plusieurs des autres réacteurs pourrait influencer la situation radiologique, mais ne relève pas de l’objet de la présente évaluation de l’impact environnemental ». On ne sait donc rien sur l’effet du démantèlement sur la situation radiologique, l’ignorance apparente des responsables nous rend méfiants avant d’avoir plus d’information !

  • Le site de Tihange se trouve sur une ligne aérienne fréquentée menant à Bierset, à moins de 5 minutes de vol. De gros porteurs, comme les Boeing 747 passent à basse altitude (2500 pieds) très près de la centrale et du futur site de stockage SF2, comme le montre une vidéo sur YouTube. Tihange 3 n’a pas la résistance nécessaire pour résister au crash d’un avion moderne avec en plus son réservoir de combustible bien rempli après un décollage de Bierset. T3 et D4 n’ont été validés il y a longtemps que pour de petits aéronefs !

  • La durée de prolongation après 2026/2027 est fixée à 10 ans. Et si en 2028 ou plus tard on se rendait compte que T3/D4 ne sont plus utiles, pourquoi ne pas les fermer et les démanteler avant 2037 ? Cette possibilité devrait figurer dans les contrats avec Engie !

  • Malgré les mises à jour envisagées, nos réacteurs vieillissent inexorablement, leur conception est très proche de celle des réacteurs français, victimes de problèmes techniques fréquents, notamment de corrosion. Nous devons nous préparer à avoir de temps en temps un réacteur en panne.

  • Indépendance énergétique ? Le combustible nucléaire vient entièrement de l’étranger et une partie importante provient de Russie. L’uranium est une ressource minière épuisable, il en reste pour moins d’un siècle avec le parc mondial actuel. Le commerce d’uranium avec Rosatom (et des sociétés russes qui jouent les intermédiaires avec le Kazakhstan) continue même pendant la guerre en Ukraine, les sanctions ne s’appliquent pas, mais cette source pourrait s’arrêter brutalement aussi. Et par ailleurs bloquer l’approvisionnement de certaines centrales d’Europe de l’Est dépendant de la technologie russe, provoquant un problème au niveau européen…
    D’où va venir l’uranium des réacteurs prolongés ? La décision doit être prise avant la fin avril 2023.

  • Le coût de la prolongation par rapport à l’investissement dans le renouvelable et les économies d’énergie (isolation, etc.). Le problème est que l’argent investi pour le nucléaire est perdu pour le renouvelable et les solutions annexes : économies d’énergie, systèmes de stockage, entre autres dans l’hydrogène vert, etc., ou de partage en réseau local ou à grande distance. Il est clair qu’un euro investi dans le nucléaire ou sa prolongation économise moins de CO2 par rapport à un euro investi dans le renouvelable ou les économies d’énergie !

  • Le secteur nucléaire est-il assuré correctement ? “Les montants de responsabilité des exploitants s’élèvent à 700 millions d’euros par installation et par accident (70 millions d’euros pour les installations à « risques réduits ») et à 80 millions d’euros pour les accidents survenant lors d’un transport de substances radioactives. S’y ajoutent deux contributions supplémentaires, dont les montants ont été également augmentés : celle de l’État de l’installation, soit 500 millions d’euros, et celle des États, parties prenantes à la convention de Bruxelles, soit 300 millions d’euros.”. C’est absolument insuffisant en cas d’accident nucléaire sérieux, qui coûtera des centaines de milliards d’euros, et qui pourrait ruiner une grande partie de notre pays !

  • Bilan CO2. La production de CO2 ne se fait pas à Tihange ou à Doel, mais sur l’intégralité du cycle, de l’extraction du minerai jusqu’à la fin de la gestion des déchets. Les données propagées par le GIEC ou pire par EDF, reprises par les partisans du nucléaire, sont trop optimistes. Nous pensons que le nucléaire ne produit pas moins de CO2 que les renouvelables (mais bien sûr moins que le méthane), si l’on compte vraiment tout le cycle, qui est très long si on compte la gestion des déchets… Il n’est pas possible de prolonger les deux réacteurs sans dépenser des milliards pour la mise à niveau, les améliorations de sécurité et les protections contre le dérèglement climatique. Mais un euro investi dans cette prolongation et ses conséquences (création de déchets supplémentaires) économise certainement moins de CO2 qu’un euro investi dans le renouvelable ou les économies d’énergie !

  • Que propose le gouvernement ? Si on fait confiance à Élia (le régulateur du réseau), vu que pendant au moins 2 ou 3 ans à compter de 2025, malgré les mesures prises par la ministre (CRM, etc.), la situation actuelle nous conduit vers une rupture d’approvisionnement en électricité, nous ne pouvons pas éviter la prolongation de deux réacteurs, soit T3 & D4.
    Cependant, l’expert allemand Robert Borsch-Laaks d’Aachen nous fait remarquer que le pays a résisté à une rupture d’approvisionnement, quant à l’automne 2018, lorsque presque tous les réacteurs étaient indisponibles. Durant cette période, un seul réacteur, Doel 3, a fonctionné du 12 octobre au 13 novembre. Immédiatement après (jusqu’à la mi-décembre), Tihange 1 a de nouveau été ajouté. Cela a créé une situation qui pourrait également se produire en 2026 si seuls T3 ou D4 étaient encore en service. Au cours de cette période, ce sont principalement les centrales au gaz qui ont comblé les déficits de production causés par le manque de nucléaire en utilisant jusqu’à 75 % de la capacité installée disponible à l’époque (6,6 GW). En fonction de la capacité de contrôle des centrales à gaz et des fluctuations de l’offre d’énergies renouvelables, entre 2 et 3,5 GW ont été importés du marché intérieur de l’UE. Depuis cette date, l’offre du renouvelable a fortement augmenté et elle augmentera encore plus d’ici 2026/2027, ce qui limitera le plus possible, et peut-être totalement, la part du gaz dans le remplacement du nucléaire.

  • Le choix du gouvernement est donc de prolonger deux réacteurs pour une durée de dix ans, ce qui ne sera peut-être pas utile jusqu’en 2037, avec un investissement assez lourd et donc peu rentable financièrement ainsi qu’en CO2 économisé par Euro investi. Le projet du gouvernement induit un gaspillage de ressources et d’argent dans des réacteurs nucléaires vieillissants, de moins en moins filables, créateurs de déchets et de pollution de l’environnement, qui augmentent le risque d’un accident qui ruinerait le pays. De même l’investissement dans de nouveaux outils nucléaires (SMR ?), trop chers, trop polluants, et qui ne seront pas au point à temps, car il nous faut amorcer la transition énergétique et économe en CO2 dans les 10 ans. Le nouveau nucléaire est une voie sans issue et un gaspillage de ressources !

  • Il aurait fallu — et il est peut-être encore temps de — pousser plus à fond les solutions renouvelables, de stockage (dont l’hydrogène, vert) et les carburants verts synthétiques), de partage et de distribution de l’électricité au niveau local et à grande distance, et d’investissement dans les économies d’énergie, et dans l’isolation des bâtiments. Cette solution nécessite également des centrales à gaz, pour les pointes de consommation, car c’est pour le moment le seul outil disponible, et pour avoir une puissance en réserve. Si nous refusons la prolongation, le compromis serait situé entre une consommation un peu plus élevée de gaz (idéalement, vert, à terme), ce qui produira un bilan CO2 qui ne sera temporairement pas idéal, bien que contrebalancé par une grande proportion de renouvelables et de mesures d’économie. Le but est que dans les dix ans on avance vers une solution économe en énergies fossiles et en CO2.





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Situation du secteur électronucléaire en Belgique et en France


URGENT : Participez à la consultation du public sur la prolongation de Tihange 3 et Doel 4

Il semble que la situation se stabilise enfin, pas de changements fondamentaux avant les élections de fin 2024, ou de chute assez improbable du gouvernement dit « Vivaldi » composé de libéraux, de socialistes et d’écologistes. On pourrait dire que les libéraux sont très pronucléaires, les écologistes tentent de réaliser la sortie (à terme…) du nucléaire pour avancer vers le zéro carbone, les socialistes ont une position pragmatique qui oscille entre les deux autres partis qui se traitent mutuellement de dogmatisme…. 1

Notons que les négociations continuent toujours en ce mois de mars 2023 pour la prolongation de Tihange 3 de Doel, l’obstacle semble être l’évaluation et le partage du coût de la gestion des déchets

Engie enterre l’idée d’une mini-prolongation des trois vieux réacteurs nucléaires belges (en plus des deux autres), acceptée, semble-t-il, par les verts, et aussi d’une prolongation complète comme le voulait le MR (« Mouvement Réformateur », le parti libéral francophone belge, proche du LR en France, et Macron-compatible). Voir l’article de « La Libre Belgique ».

Tout était cependant prévu grâce au CRM, le mécanisme de soutien que le gouvernement a décidé de mettre en place pour disposer de suffisamment de moyens de production d’électricité malgré la sortie du nucléaire en 2025, créé par le gouvernement précédent et fortement amélioré par la ministre Groen (Verte)  Tinne Vanderstraeten. On nous a d’abord annoncé que vu la situation énergétique et géopolitique, la sécurité d’approvisionnement n’était pas garantie, et que Tihange 3 et Doel 4 seraient prolongés de dix ans. Ce CRM,ne semble maintenant ne plus suffire pour répondre à la période où les deux réacteurs seraient à l’arrêt avant leur remise en marche, période sans aucun réacteur en fonction, et que, donc, il y aurait aussi un manque d’électricité lorsque ces deux réacteurs seraient à l’arrêt avant leur remise en marche. Élia, le gestionnaire du réseau, confirme le constat de décembre 2022 : pour l’hiver 2025-2026, il manque 900 à 1.200 MW. Et rebelote pour l’hiver 2026-2027 si les travaux de prolongation de Doel 4 et Tihange 3 ne sont pas terminés. Ce qui poussait le MR à demander la prolongation de 5 réacteurs, et les Verts à accepter une extension temporaire de certains réacteurs pendant cette période, tout en insistant sur la sortie à terme du nucléaire.
Or Engie vient de dire non à ces demandes.
Ce ne serait possible qu’en changeant les règles de sécurité dérivant des directives européennes post-Fukushima ! Le MR serait, semble-t-il, prêt à s’asseoir sur la sécurité, mais personne ne le suit…

Dernière proposition à l’étude : accélérer la mise au niveau de Tihange 3 et Doel 4 en limitant leur temps d’arrêt, de manière à ce qu’ils soient disponibles plus tôt que prévu en 2025.

Dernière mauvaise nouvelle, la participation de la Belgique à l’alliance nucléaire européenne initiée par la France !?
«
La Libre Belgique » apprend que le Premier ministre reprend le dossier en main et prendra des contacts diplomatiques pour que la Belgique dispose du statut d’observateur au sein de l’alliance. Tout ceci est lié au développement de nouveaux réacteurs SMR, et il n’est pas exclu que l’on fasse partie intégrante du club européen pronucléaire !?

Et pourquoi donc l’alarme n’a-t-elle pas sonné plus tôt ?
Extraits de cet article de l’Écho, réservé aux abonnés :
“ C’est en fait en décembre 2022, suite à une nouvelle évaluation de la sécurité d’approvisionnement par élia, qu’il est apparu que la prolongation de Doel 4 et Tihange 3 pour dix ans, à partir de l’hiver 2026, ne suffirait pas. Une évaluation que lui avait demandée le gouvernement De Croo parce que certains, au sein de la majorité, avaient des doutes, et que la situation énergétique en Europe s’était dégradée avec la guerre en Ukraine, de possibles problèmes d’approvisionnement en gaz en Allemagne, mais surtout l’indisponibilité plus grande que prévu du parc nucléaire français. ”

Et les aveux de M.C. Marghem, ancienne ministre libérale (MR) de l’énergie: “ Quand on rappelle cet épisode à Marie Christine Marghem, elle affirme que pour elle, le CRM n’a jamais eu pour but d’assurer la sécurité d’approvisionnement de la Belgique. « Il ne s’agissait pour moi que d’un outil d’appoint, pour remplacer l’une ou l’autre vieille riquette au gaz. Je n’ai jamais caché que mon but était de prolonger le nucléaire, même si j’avais l’ordre formel et militaire de Charles Michel de prêcher à l’extérieur pour la sortie du nucléaire. »

Le secteur nucléaire civil belge est-il assuré en cas de catastrophe ?

  • Le nucléaire civil est-il couvert par des assurances ? Oui, mais ridiculement peu !
  • Les risques sont-ils couverts ? Très faiblement !
  • Qui va payer les dégâts ? Pour la plus grande partie, les contribuables !
  • Conventions sur la responsabilité civile nucléaire (2022) : “Les montants de responsabilité des exploitants s’élèvent à 700 millions d’euros par installation et par accident (70 millions d’euros pour les installations à « risques réduits ») et à 80 millions d’euros pour les accidents survenant lors d’un transport de substances radioactives. S’y ajoutent deux contributions supplémentaires, dont les montants ont été également augmentés : celle de l’État de l’installation, soit 500 millions d’euros, et celle des États, parties à la convention de Bruxelles, soit 300 millions d’euros.”

Les fonds disponibles pour l’indemnisation des victimes d’un accident nucléaire s’élèvent donc au total à 1,5 milliard d’euros. Un montant bien inférieur à n’importe quel accident nucléaire sérieux. Plus de détails à ce sujet dans notre article à ce sujet

Et en France ?

L’EPR à tout prix, accélérer en simplifiant les procédures de contrôle (et si problème de financement, ponction sur le Livret A des petits épargnants…), le coup de force de Macron confisque l’avenir :

Le 21 mars 2023, adoption en France du projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes
Note importante : « L’amendement (n°CE602) du gouvernement qui prévoyait la fusion entre l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a été supprimé. Les députés ont adopté un amendement (n°190) visant à garantir une séparation des activités de ces deux organismes. »
Cependant, le gouvernement français va essayer par tous les moyens de contourner ou d’invalider cet amendement !

Qui peut parler d’indépendance énergétique avec de l’uranium étranger, dont une part non négligeable est russe ? Et alors qu’ils prétendent maîtriser la chaîne de combustible, pourquoi les Français continuent-ils à envoyer encore aujourd’hui une partie de leurs combustibles usés en Russie, et pourquoi le commerce nucléaire avec la Russie n’est-il pas concerné par les sanctions ? Lire l’article de Greenpeace !

Nous apprenons maintenant que le coût de l’EPR anglais a été déjà multiplié par deux par rapport à l’évaluation initiale, surcoût qui sera imputé à EDF !

Les déchets nucléaires

En France, le pharaonique projet d’enfouissement à Bure, prévu pour plus de 100 ans de travail, pose énormément de questions sans réponses !

Liens entre le civil et le militaire

Macron déclarait récemment qu’ “il n’y a pas de nucléaire civil sans le nucléaire militaire, et pas de pas de nucléaire militaire sans le nucléaire civil ».

L’histoire du développement du nucléaire civil est très claire à ce sujet, et notons que les pays les plus acharnés à défendre l’électronucléaire sont ceux qui détiennent l’arme nucléaire, ou qui veulent l’avoir…

La recherche et les infrastructures sont très liées, le nucléaire civil a permis de fournir les matériaux des bombes, en particulier au niveau du plutonium extrait des déchets de fission, et des installations d’enrichissement de l’uranium.

Et pas seulement au début, vu que même si les stocks d’armes nucléaires sont énormes, ces engins ont une date de péremption, et génèrent des déchets qui devront être stockés (avec ?) les déchets de l’industrie électronucléaire, et personne n’en parle vraiment.

L’extension du nucléaire civil et une circulation du plutonium et des déchets nucléaires augmentent notre crainte de la prolifération et du terrorisme. Une bombe « sale » est à la portée du premier groupe terroriste venu…

Le problème des fissures continue en France et était même prévisible depuis la construction des centrales !

Après avoir abandonné les solutions françaises basées sur la filière graphite-gaz (qui ont foiré, voire l’accident de Saint-Laurent des Eaux) , ils ont construit les centrales actuellement en fonctionnement suivant un brevet américain de Westinghouse à eau pressurisée (PWR), en y ajoutant, notamment pour améliorer la sécurité, des tuyaux bricolés qui sont maintenant en train de céder, et ça ne fait peut-être que commencer.…

Cocorico ?

En 1979, le président d’EDF avait déjà connaissance du risque de fissures,2, mais minimisait le problème, car de toute façon ça ne pouvait devenir dangereux « qu’après 30 à 40 ans » alors que les réacteurs ne durent qu’un peu plus de 30 ans !

De plus, il confirme que le vieillissement de l’acier est lié au nombre de cycles thermiques (chaud/froid), et que les dites fissures ne devraient pas apparaître avant 12000 cycles, soit 12000 jours, à peu près 32 ans…

Et ceci confirme que le nucléaire civil n’est vraiment pas pilotable, car si on peut diminuer le régime journellement par exemple la nuit, faire des arrêts complets fréquents (peu pratiques car assez lents), créerait encore plus de chocs thermiques qui limitent la durée de vie de l’outil !

En Belgique, la méthode n’est pas encore définie, enfouissement ou stockage au sol ou en subsurface ? De toute façon, les coûts à long terme seront astronomiques et légués aux générations futures ! Engie négocie actuellement avec le gouvernement un plafond de responsabilité financière alors que personne ne connaît le coût final de l’opération !

La seule décision claire à l’heure actuelle est de construire un entreposage à sec dans une structure en béton à Tihange, pour au moins 80 ans, en attendant.

« En attendant », des fuites de déchets nucléaires ont été déjà détectées dans notre pays :
ici et !

Production, intensité carbone et transfert d’énergie électrique

Consultez ElectricityMaps  (Il existe une App sur Smartphone !) pour voir la répartition et l’intensité carbone de notre électricité, ainsi que les exportations/importations :
Belgique : https://app.electricitymaps.com/zone/BE
France : https://app.electricitymaps.com/zone/FR
Allemagne : https://app.electricitymaps.com/zone/DE

(1) Cet article est un résumé et un complément de l’article publié sur ce site retraçant l’historique de la saga !
(2) Voir le Canard Enchaîné du 15/03/23. Copie de l’article disponible sur demande.

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Le site d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure en France, ce sera :

  • 120 ans de travaux, pour pouvoir enfouir la plus grande partie de la production française de déchets depuis le début jusque maintenant, soit 85 000 m³, pas de place pour la production future !
  • Réversibilité promise en « mode mensonge », en pratique en cas de problème, il ne sera pas possible de retirer les fûts endommagés. Et après 130 ans, on ferme la porte, pour limiter les frais. Mais, sans surveillance, les dégâts seront inévitables dans le futur plus ou moins lointain, vu que les inévitables fuites d’hydrogène dû à l’irradiation, qui vont créer des dégâts chimiques (acides, etc., provoquant des fuites vers les nappes phréatiques), voire des incendies ou des explosions créées par l’hydrogène répandu dans les galeries. Les produits bitumineux sont notoirement inflammables et ne devraient pas se trouver dans ce stockage.
  • 500 hectares occupés au sol.
  • Au moins 25 milliards d’euros provisionnés en 2021, l’Andra estime le coût à 35 milliards, mais le coût total dans 120 ans est impossible à estimer. Le seul point positif, c’est qu’on espère que dans le futur les techniques auront évolué dans le sens de la (vraie) décarbonation et des économies d’énergie.
  • Entre et 724 (au début) et 822 (à la fin en 2146) mégawatts-heures d’électricité en moyenne par jour. Ceci correspond à la consommation de plus de 80 000 familles consommant 3500 Kwh/an.
  • 106 000 tonnes d’acier, soit 14 tours Eiffel (chacune à 7300 tonnes).
  • 6 millions de mètres cubes de béton, soit, en tonnes, plus que la pyramide de Khéops !
    En effet pour retarder l’effondrement des galeries, du béton sera projeté sur les voutes. Du béton qui a une durée de vie très limitée par rapport à la durée de dangerosité des produits. L’effondrement probable limitera l’accès du site aux scientifiques du futur, qui auront peut-être trouvé des nouveaux procédés pour traiter les déchets nucléaires.
    Ceci correspond à 15 000 base d’éoliennes de 3 MW ! (à 400 m³ /éolienne)
  • Des galeries pour 270 km, soit plus de 2 fois la longueur du métro parisien (plus une quantité d’alcôves longues jusqu’à 50mètres pour stocker les déchets de haute activité).
    Ces déchets seront emballés dans des cylindres à parois minces qui irradieront l’eau présente dans l’argile. La décomposition de l’eau par radiolyse conduira à la création d’acides qui dégraderont les contenants à moyen terme.
  • Des remblais équivalents au volume excavé du tunnel sous la manche.
  • Une usine au sol de déballage/remballage de produits extrêmement radioactifs.
  • 2 wagons de chemin de fer par semaine pendant des décennies.
  • L’aération et l’extraction de l’eau s’arrêteront lorsque les portes se fermeront vers 2150…

Tous les chiffres sont ici : les chiffres de l’Andra et le groupe de soutien à Bure (16 dossiers PDF pour 160 pages au format papier !) : voir ce site pour comprendre tous les aspects de ce projet démesuré qui durera quasi 150 ans à Bure dans le département de la Meuse. Au moins un wagon de chemin de fer sera traité par semaine, pendant plus d’un siècle, plus de galeries que le métro de paris (270 km et une multitude d’alcôves horizontales de 70 cm de diamètre sur plus de 50 m de long), des risques d’incendie due à l’hydrogène et aux produits inflammables (présence de bitume !), de fuites dans le bassin de la Marne, qui est connecté au bassin de Paris, tromperie sur la « réversibilité », du béton, de l’acier et un gaspillage énorme qui plombera le bilan énergétique et CO² du nucléaire français, des installations de manutention de matières dangereuses au sol pendant un siècle, coût indéterminé car pas provisionné du tout pour les prochains 120 ans, coût qui pourrait atteindre les 100 milliards d’Euros actuels pour la plus grand part à charge de nos descendants ?…..
Tout ceci diminue le bilan énergétique du nucléaire français, et aussi le bilan carbone, rien que le béton produira 1.2 million de tonnes de CO2, l’acier jusqu’à 190 000 tonnes de CO2, sans compter les GEZS produits par les autres ressources et services (transports, électricité etc..) pendant plus d’un siècle. Un bilan incluant le futur plus ou moins lointain est impossible, car nous pouvons espérer que d’ici quelques décennies et dans les siècles, voire les millénaire que durera la gestion de ces déchets, les ressources nécessaires seront vraiment neutres en carbone.

Il y a déjà un état policier assez difficile à imaginer pour nous, qui rend la vie très difficile aux habitants, aux militants et aux journalistes qui tentent de visiter les lieux… Un d’eux a été arrêté pour avoir un couteau opinel dans son sac…

Ce n’est pas une solution technique, c’est juste une opération politique pour dire qu’« on a une solution » autre que le stockage en surface ou en subsurface, et surtout qui à long terme ne coûterait plus rien une fois la porte fermée et les déchets « oubliés »… Et quand les physiciens du futur auront trouvé une vraie solution pour traiter ces déchets, ils ne pourront pas les déterrer pour les traiter ou en retirer de l’énergie, ces techniciens du futur auront juste le souci de tenter de colmater les fuites qui risquent de se promener jusqu’à Paris… La couche d’argile n’est, non seulement, pas idéale, mais il y aura production d’acides carboniques et autres (à la suite de l’irradiation de l’eau présente dans l’argile), mais en plus la quantité incroyable de galeries va peut-être la fragiliser encore plus, comme ça s’est passé en Allemagne…

Oui, il y a 160 pages dans le dossier, mais vous pouvez survoler les chapitres et noter les sujets abordés, il y a souvent un résumé à la fin des chapitres !

Et observez les parallèles entre Onkalo en Finlande et Bure !

Et n’oublions pas le scandale de Stocamine, installation de stockage de déchets chimiques dans une mine de sel en Alsace, qui s’avère être un fiasco menaçant les nappes phréatiques de toute une région, malgré les promesses de réversibilité extrêmement difficile à mettre en œuvre.

Nous n’avons pas de certitudes à propos du coût de Cigeo-Bure, ce sera un peu comme l’EPR : 25, puis 35 milliards d’euros (Andra) pour commencer, puis… ?

Personne ne peut évaluer le coût final, quelques dizaines de milliards ont été provisionnées pour les quelques prochaines décennies de ce chantier titanesque, le conditionnement/emballage sur place et le remplissage dureront entre 120 et 150 ans.
Il est probable que le budget dépassera très largement les 30 à 35 milliards d’euros en valeur actuelle officiellement estimés (et non 25 milliards d’euros, cité dans un arrêté ministériel), chiffre qui varie suivant les acteurs concernés, qui sont censés financer l’opération en vertu du principe pollueur-payeur…

Et il est hautement probable que, en douce et sous « secret-défense », les déchets de l’armement nucléaire seront stockés aussi à Bure et payés directement ou indirectement par le client d’EDF… Les ogives nucléaires on une date de péremption et doivent être remplacées régulièrement. Où vont-ils mettre ces déchets ?

Comment prévoir les coûts sur une période aussi longue, qui implique des changements technologiques, sociétaux, économiques, monétaires ?
A propos de la durée, certains parlent de « 100 000 ans », ce sera bien plus. Par exemple le plutonium a une durée de vie 24 000 ans. Cependant il se transmute presque totalement en uranium 235, qui a lui une demi-vie de 703 millions d’années….

Et en Belgique ? La méthode n’est pas encore définie, enfouissement ou stockage au sol ou en sub-surface ? Le cout est estimé par Engie et le gouvernement Belge à un maximum de 15 milliards d’euros, pour 6 GW, soit le dixième des 60 GW de la France…
De toute façon, les coûts à long terme seront astronomiques et légués aux générations futures !

NOTES :

Le schéma !

Coût : au moins 25 milliards d’euros en 2018 mais vous pouvez voir les estimations à la hausse (35 milliards pour l’Andra…) dans ce PowerPoint très complet sur l’analyse des coûts de Cigéo-Bure !

Lire Le Canard Enchaîné du 25/01/2023 « La poubelle la plus chic de la planète »

Vidéos : Chronique d’un échec annoncé, avec Bernard Laponge
Partie 1 Partie 2

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Le secteur nucléaire civil est-il assuré en cas de catastrophe ?

  • Le nucléaire civil est-il couvert par des assurances ? Oui, mais ridiculement peu !
  • Les risques sont-ils couverts ? Très faiblement !
  • Qui va payer les dégâts ? Pour la plus grande partie, les contribuables !
  • Conventions sur la responsabilité civile nucléaire (2022) :
    « Les montants de responsabilité des exploitants s’élèvent à 700 millions d’euros par installation et par accident (70 millions d’euros pour les installations à « risques réduits ») et à 80 millions d’euros pour les accidents survenant lors d’un transport de substances radioactives. S’y ajoutent deux contributions supplémentaires, dont les montants ont été également augmentés : celle de l’État de l’installation, soit 500 millions d’euros, et celle des États, parties à la convention de Bruxelles, soit 300 millions d’euros. »

Les fonds disponibles pour l’indemnisation des victimes d’un accident nucléaire s’élèvent donc au total à 1,5 milliard d’euros.
Un montant bien inférieur à n’importe quel accident nucléaire sérieux.

Le montant du dommage nucléaire à concurrence duquel la responsabilité de l’exploitant est engagée s’élève donc à 700 millions d’euros pour chaque accident nucléaire en Belgique, selon la convention de Paris de 1960, amendée en 1985 et complétée en 2022.

Les exploitants recourent aux assurances pour ce petit montant de 700 millions d’euros et les États garantissent le reste, soit 800 millions d’euros, car les compagnies d’assurances, bien conscientes de l’ampleur du risque, n’ont pas voulu s’engager dans ce domaine, au-delà de ce montant de 700 millions d’euros.

Coût de la catastrophe nucléaire de Fukushima : un minimum de 500 milliards d’euros, plus quelques centaines de milliards d’euros en plus si l’on prend en compte les décennies de travail pour le démantèlement des réacteurs et le nettoyage du site de la centrale, la décontamination ainsi que la revalidation des zones évacuées.

Chez nous, vu la densité de population bien plus forte que dans la préfecture de Fukushima, ce sera bien pire, et s’il fallait évacuer Liège, Namur, ou Anvers, cela menacerait la stabilité même du pays… Un sinistre évalué à 1000 milliards d’euros est plausible…

Sans cette convention et ses amendements, il n’y aurait jamais eu d’industrie électronucléaire, car les producteurs d’énergie nucléaire ne veulent pas engager leur responsabilité au-delà d’une somme limitée, et les assureurs ne veulent pas prendre le risque réel concernant un accident majeur!

Bref, en cas d’accident nucléaire, comme les dégâts seront à coup sûr bien plus élevés que 1,5 milliard d’euros, ce sera l’État, donc les contribuables, qui paiera la plus grande part du montant des dégâts ! Il y aura bien la garantie d’État(s) de 800 millions d’euros, États(s), qui se retourneront contre le producteur, qui — on l’espère — ne se sera pas en faillite…

Et pour le reste, les centaines de milliards d’euros non assurés, qui paiera ?

  • Ce montant de 1,5 milliard d‘euros représente moins de 3% du chiffre d’affaires d’Engie en 2022. Le résultat net récurrent (hors exceptionnels) du groupe ENGIE pour cette année 2022 devrait se situer à peu près à 5 milliards d’euros.
  • Il n’y a pas de responsabilité en cas d’attaque terroriste ou de conflit armé : « L’exploitant d’une installation nucléaire n’est pas responsable des dommages nucléaires causés par un accident nucléaire si cet accident est dû directement à des actes de conflit armé, d’hostilités, de guerre civile et d’insurrection. »

NOTES :

Les compagnies d’assurance refusant d’assurer ce risque, même limité, les producteurs se reposent alors sur une intervention de l’État, sous forme de garantie !

Extrait : « Les exploitants nucléaires doivent disposer des garanties financières couvrant leur responsabilité vis-à-vis des victimes. Pour ce faire, ils contractent le plus souvent une assurance sur le marché de l’assurance privée. Il est toutefois possible que certains dommages nucléaires visés par la version modifiée de la convention de Paris ne soient pas couverts par le marché de l’assurance dans le domaine de l’énergie nucléaire. La Belgique mettra donc en place un régime de garanties publiques qui couvrira les dommages nucléaires qui ne peuvent pas être couverts par une assurance privée.

Dans le cadre de ce régime, l’exploitant nucléaire versera une prime annuelle pour bénéficier de la garantie publique. En cas d’accident nucléaire, s’il est fait appel à la garantie publique, l’exploitant nucléaire demeurera néanmoins responsable de tous les dommages nucléaires et l’État pourra ensuite récupérer les montants versés au titre de la garantie auprès de l’exploitant nucléaire. »

Un événement très important marque le début de l’année 2022 dans le domaine de la responsabilité civile pour dommage nucléaire (RCN). Il s’agit de l’entrée en vigueur des protocoles d’amendement des conventions de Paris et de Bruxelles signés le 12 février 2004. Ces protocoles, dont le texte vient d’être publié au Journal Officiel par décret du 17 janvier, ont pu entrer en vigueur 18 ans après leur signature grâce au dépôt simultané des instruments de ratification par les États, parties aux conventions d’origine, ce qui s’est produit le vendredi 17 décembre 2021 dans le cadre de l’Agence de l’énergie nucléaire (AEN) de l’OCDE.

NOTES

Convention de Paris : le texte

Paris Convention on Third Party Liability in the Field of Nuclear Energy

Cout final de Fukushima

Entrée en vigueur des conventions de Paris et Bruxelles en 2022

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Prolongation de Tihange 3 et Doel 4 : le point sur la situation.

Article mis à jour le 01/03/2023

Tout était cependant prévu grâce au CRM, le mécanisme de soutien que le gouvernement a décidé de mettre en place pour disposer de suffisamment de moyens de production d’électricité malgré la sortie du nucléaire en 2025, créé par le gouvernement précédent et fortement amélioré par la ministre Tinne Vanderstraeten. On nous a d’abord annoncé que, vu la situation énergétique et géopolitique, la sécurité d’approvisionnement n’était pas garantie, et que Tihange 3 et Doel 4 seraient prolongés de dix ans, voir l’historique ci-dessous. Ce CRM ne semble maintenant ne plus suffire pour répondre à la période où les deux réacteurs seraient à l’arrêt avant leur remise en marche, période sans aucun réacteur en fonction, et donc qu’il y aurait un manque d’électricité lorsque ces deux réacteurs seraient à l’arrêt avant leur remise en marche. Elia, le gestionnaire du réseau, confirme le constat de décembre 2022 : pour l’hiver 2025-2026, il manque 900 à 1.200 MW. Et rebelote pour l’hiver 2026-2027 si les travaux de prolongation de Doel 4 et Tihange 3 ne sont pas terminés. Ce qui poussait le MR à demander la prolongation de 5 réacteurs, et les Verts à accepter une extension temporaire de certains réacteurs pendant cette période, tout en insistant sur la sortie à terme du nucléaire.

Or Engie vient de dire non à ces demandes……..
Ce ne serait possible qu’en changeant les règles de sécurité crées au niveau Européen après Fukushima, auxquelles les anciens réacteurs ne répondent pas !
Le MR serait semble-t-il prêt à s’asseoir sur ces règles de sécurité, mais cette opinion divise la Vivaldi.

Dernière proposition à l’étude : accélérer la mise au niveau de Tihange 3 et Doel 4 en limitant leur temps d’arrêt, voire en ne les arrêtant pas du tout, de manière à ce qu’ils soient disponibles plus tôt que prévu en 2025.

Dernière (mauvaise) nouvelle :
Participation de la Belgique à l’alliance nucléaire européenne initiée par la France !?
«
La Libre Belgique » apprend que le Premier ministre reprend le dossier en main et prendra des contacts diplomatiques pour que la Belgique dispose du statut d’observateur au sein de l’alliance. Tout ceci est lié au développement de nouveaux réacteurs SMR, et il n’est pas exclu que l’on fasse partie intégrante du club européen pro-nucléaire !?

Pourquoi l’alarme n’a-t-elle pas sonné plus tôt ?
Extraits de l’article de l’Echo du 19 février 2023 :

“ C’est en fait en décembre 2022, suite à une nouvelle évaluation de la sécurité d’approvisionnement par Elia, qu’il est apparu que la prolongation de Doel 4 et Tihange 3 pour dix ans, à partir de l’hiver 2026, ne suffirait pas. Une évaluation que lui avait demandée le gouvernement De Croo parce que certains, au sein de la majorité, avaient des doutes, et que la situation énergétique en Europe s’était dégradée avec la guerre en Ukraine, de possibles problèmes d’approvisionnement en gaz en Allemagne, mais surtout l’indisponibilité plus grande que prévu du parc nucléaire français. ”

Et les aveux de M.C. Marghem : “
Quand on rappelle cet épisode à Marie Christine Marghem, elle affirme que pour elle, le CRM n’a jamais eu pour but d’assurer la sécurité d’approvisionnement de la Belgique. Il ne s’agissait pour moi que d’un outil d’appoint, pour remplacer l’une ou l’autre vieille riquette au gaz. Je n’ai jamais caché que mon but était de prolonger le nucléaire, même si j’avais l’ordre formel et militaire de Charles Michel de prêcher à l’extérieur pour la sortie du nucléaire. » ”

Se prétendant dos au mur, par crainte des risques sur l’approvisionnement et les prix de l’énergie, le gouvernement « Vivaldi » prépare un accord avec Engie, dans lequel ce dernier déclare qu’il mettra « tout en œuvre » pour redémarrer les deux réacteurs le 1er novembre 2026. C’est une obligation de moyen et non de résultat, autrement dit, il n’est même pas sûr qu’ils y arrivent à temps ! Cette décision n’est pas intégrée dans une stratégie énergétique cohérente, plutôt que de co-investir dans cette prolongation, il faut maintenant concentrer les ressources actuelles et futures à la transition énergétique : soit à la sobriété énergétique, au développement des renouvelables de moins en moins chers, à la réforme et la « décentralisation »  des réseaux de distribution électrique, au développement du stockage, à la production, la distribution et l’utilisation de l’hydrogène pour remplacer le méthane, la protection de la biodiversité, une agriculture plus respectueuse des écosystèmes, moins basée sur les énergies fossiles, plus locale, pour arriver au zéro carbone en 2050…

Le gouvernement a fait un gros cadeau à Engie en acceptant le principe d’un plafond, au montant encore non déterminé, pour les déchets nucléaires. Le choix de la méthode de traitement des déchets est de toute façon reporté au prochain gouvernement !
Ce plafonnement a pour conséquences que ce sont les contribuables belges qui vont payer une partie de la facture d’élimination des déchets nucléaires d’Engie, si le plafond est dépassé, ce qui est hautement probable(1) Nous craignons que cette gestion des déchets, sur des durées dont personne n’a vraiment idée, coûtera plus cher que prévu, la facture sera envoyée aux générations futures : pratique pour les politiques, inacceptable pour nous ! Le recyclage des déchets pour en faire de nouveaux combustibles ne règle rien, seul 1 % en volume (le plutonium) est récupéré au prix de procédés chimiques produisant des déchets, et une fois le combustible recyclé usé, il devient un déchet non recyclable encore plus radioactif et dangereux que les déchets du premier cycle…Et les petits réacteurs modulaires (SMR) envisagés pour le futur produiront proportionnellement plus de déchets dangereux que les gros réacteurs…
Et de fait ce calcul de ce plafond, attendu pour mars 2023, pourrait bloquer la signature définitive d’Engie concernant la prolongation des deux réacteurs, car « tant qu’il n’y a pas accord sur tout, il n’y a d’accord sur rien ! »
Les parties, qui sont d’accord sur le partage bénéfices/risques de la prolongation des deux réacteurs, annoncent qu’un nouvel accord partiel, plus complet, doit être trouvé d’ici le 15 mars. Le document juridiquement contraignant, quant à lui, devra être signé pour le 30 juin 2023. Il y a encore des conditions légales à remplir pour la prolongation , y compris une « enquête environnementale » qui nous permettra de protester, sans certitude d’être entendu, alors que Mr De Croo a déjà déclaré que les « travaux commencent ce 10 janvier» !

Le premier ministre déclare stupidement (ou avec une forte mauvaise foi?) que le « nucléaire n’émet pas de CO2« . Le GIEC donne le chiffre de 12 g CO2/Kwh électrique, alors que les estimations sérieuses de calcul du cycle de vie montrent que la production de CO2 est égale voire bien supérieure à celles des renouvelables, cad au moins 50 g CO2/Kwhe, (mais heureusement très inférieure au gaz). Et encore plus de CO2 si on prend en compte la gestion des déchets pendant une durée très longue, ainsi que le nettoyage des dégâts miniers, et l’augmentation du coût énergétique de l’uranium, qui va de plus en plus se raréfier !

La soi-disant « indépendance énergétique » se ferait donc sur base d’uranium enrichi provenant en grande partie, directement ou indirectement, de la Russie : notons que la firme russe Rosatom n’est pas concernée par les sanctions !?

Question sécurité, rien n’est garanti ! Il se peut fort bien que ces réacteurs vieillissants tombent en panne comme leurs équivalents français cette année, voire pire. Car un accident grave est toujours possible, ce qui, dans une région aussi peuplée que la Belgique, signifierait une catastrophe sanitaire, économique et sociale  majeure : comment évacuer des dizaines, voire des centaines de milliers de personnes (Lège, Namur, ou Anvers?), et perdre un territoire contaminé pour une durée indéterminée, comme à Tchernobyl et Fukushima, où les gens hésitent toujours à revenir dans les zones les moins contaminées, mais toujours dangereuses pour la santé ?

Jusqu’il y a peu, la ministre prétendait que son plan (Mécanisme de Rémunération de Capacité CRM), pouvait parfaitement pallier la fin totale du nucléaire en 2025. De fait, Elia annonce dans son rapport qu’étant donné la situation au niveau Européen, aggravée par le manque de fiabilité du nucléaire Français, et le prix et la disponibilité du gaz et de l’énergie en général, il y aurait un manque d’énergie électrique en 2025, contredisant ses rapports précédent d’avant la guerre d’ Ukraine. Elia annonce maintenant que si Tihange 3 et Doel 4 sont arrêtés pour être prolongés en 2026, il n’y aura pas besoin de nouvelles centrales au gaz en 2025, ces deux unités programmées dans le CRM suffiraient, et ceci rassure le public à qui on présente le risque du black-out.(3)
En fait ils prolongent de dix ans ces deux réacteurs pour la période 2025-2035 pour palier des incertitudes liées à aux années 2026-2028 sans possibilité d’arrêter ces réacteurs s’ils ne sont plus utiles après cette période, à part générer de futurs coûts de gestion des déchets et d’augmenter les risques d’accident irréversible pour la majeure partie de la population belge. Qui peut prédire quelle sera la situation géopolitique et économique à partir de 2028 ?
Ces réacteurs sont certes amortis, mais ils sont vieux et susceptibles de coûter en réparations (voir l’exemple français.), et moins on les utilise moins il y aurait de déchets pour lesquels on n’a pas de solution sérieuse, et qui génèrent des coûts à très long terme, car les enterrer et les « oublier » après quelques années n’est pas respectueux de la planète ni des générations futures.
L’énergie nucléaire est maintenant l’énergie la plus chère qui existe et elle ne sauvera pas le climat ! (4)
En plus, pour chaque € investi dans une filière énergétique, le nucléaire est l’énergie qui économise le moins le moins de grammes de CO2 !

En effet les mesures déjà prévues vont monter en puissance dans ces années-là, dont l’augmentation programmée de l’éolien en mer, une meilleure gestion de la mobilité qui inclus, certes des véhicules électriques, mais devrait inclure aussi une diminution du parc automobile.
L’éolien en mer devrait atteindre au minimum 5,5 GW en 2030, soit une augmentation de
3,3 Gw par rapport à 2025, donc plus qu’un réacteur de 1 Gw*. Rien qu’avec ce projet, sans tenir compte de l’augmentation des autres renouvelables (éolien terrestre, solaire…), en 2030 au plus tard l’augmentation de l’éolien en mer du nord remplacera déjà un peu plus qu’un des deux réacteurs prolongés.(5)

Production, intensité carbone et transfert d’énergie électrique
Consultez ElectricityMaps  (Il existe une App sur Smartphone !) pour voir la répartition et l’intensité carbone de notre électricité, ainsi que les exportations/importations, par jour, par mois, par année.
Belgique : https://app.electricitymaps.com/zone/BE
France : https://app.electricitymaps.com/zone/FR
Allemagne : https://app.electricitymaps.com/zone/DE



NOTES  :

  1. Le démantèlement des réacteurs resterait aux frais d’Engie, point à confirmer !
    Le gouvernement prétend que sa participation aux bénéfices d’exploitation réduira le risque d’augmentation du prix de l’électricité. Il faudra vérifier comment, dans le cadre de la cogestion 50/50 avec Engie, le gouvernement participe aux frais de prolongation des réacteurs…
  2. En France, 200 millions de tonne de déchets radioactifs !
    Au Niger Orano laisse des boues hautement radioactives, résidu de la concentration du minerai d’Uranium , vidéo de la Criirad !
  3. Rappelons le projet du MR, dans leur dernier programme électoral, d’installer 9 centrales à gaz !
  4. Ça améliore le bilan carbone d’un pays (surtout la France), mais au niveau global, le nucléaire représente à peine quelques % de la consommation mondiale d’énergie, donc il faudrait le multiplier par 10 ou 20 pour avoir un impact planétaire sur le climat, en calculant avec les coefficients CO2 du GIEC, qui sont surévalués. Il n’y a tout simplement pas assez d’uranium en réserve, facilement extractible, pour continuer plus d’un siècle avec la consommation actuelle, et encore moins si on multiplie le nombre de réacteurs en fonctionnement (à peu près 450) : ce serait épuisé en quelques années…. L’uranium est une ressource minière non renouvelable et non-locale, qui nous rend dépendant de sociétés étrangères, dont certaines sont russes… Le soi-disant recyclage des combustibles usés ne change pas la donne et pose d’autres problèmes : seulement 1% de récupération en volume, production finale de déchets non-recyclables, encore plus dangereux et plus difficiles à gérer, car en particulier ils doivent rester beaucoup plus longtemps en piscine de désactivation.
    Pour chaque € investi dans une filière énergétique, le nucléaire est l’énergie qui économise le moins de grammes de CO2 !
  5. En tenant compte du facteur de charge minimal de l’éolien en mer de 34%, et de 80% pour le réacteur nucléaire de 1 Gw.
    En 2021, 2,2 GW installé en mer du nord, le solde pour 5,5 est prévu avant 2030 : https://economie.fgov.be/fr/themes/energie/sources-denergie/energies-renouvelables/exploitation-en-mer-du-nord/energie-eolienne-belge
    https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_%C3%A9olienne_en_Belgique







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